Supprimer les privilèges politiques
Les mesures que les politiciens prennent ne les affectent pas, vu tout l’argent qu’ils gagnent : c’est facile, pour eux. Aujourd'hui, la caste politique s’épanouit au pays des profiteurs. Elle rend la politique malade de l'argent roi, des privilèges, des indemnités de sortie, des accointances avec la haute finance. Pourtant, le point de départ de la politique est un engagement envers la société. Les responsables politiques doivent servir le peuple, pas se servir eux-mêmes. Nous avons aussi besoin de moins de ministres et de plus d’unité.
Cela fait des années que le PTB tape sur le clou : la politique est malade de l'argent roi. En 2017, Peter Mertens, secrétaire général du PTB, a décrit dans son livre « Au pays des profiteurs » comment les représentants politiques surpayés passent et repassent sans aucun problème du monde politique à celui des grandes entreprises et inversement et à quel point la corruption intervient dans ce processus. Les parlements ne constituent pas un reflet de la population, mais une caste de privilégiés qui sont à peu près les seuls dans ce pays à fixer eux-mêmes leurs salaires. Comme leur soif de profit n’est jamais satisfaite, ils s'octroient en plus de plantureux suppléments et indemnités. En plus de tous ces privilèges, une majorité de représentants politiques cumulent allègrement les fonctions. Ils combinent un mandat politique à des postes publics souvent bien rémunérés, ainsi qu'à des postes dans le secteur privé.
Ces responsables politiques, du haut de leurs dix-mille euros par mois, osent alors nous dire que « les Belges vivent au-dessus de leurs moyens ». Ils nous font travailler plus longtemps. Ils votent un saut d'index et laissent les prix de l'énergie s'envoler sans rien faire pour les bloquer. Au pic de la crise énergétique, le Premier ministre Alexander De Croo a prédit : « les cinq à dix prochains hivers seront difficiles ». Facile de se contenter de cela lorsque l'on ne ressent pas soi-même les conséquences des mesures que l'on prend. Ils ne remarquent même pas la hausse des prix de l'énergie. Ils ont depuis longtemps assuré leurs arrières.
Ils estiment également que leur situation privilégiée est tout à fait normale. À propos de son salaire de 8 472 euros bruts plus 2 497 euros de défraiement, Barbara Pas, cheffe de groupe à la Chambre pour le VB, a déclaré dans « De Zondag » : « ce n'est pas trop payé pour le travail que je fournis jour et nuit ». « Pour 3000 euros net par mois, je ne voudrais pas être député », a déclaré Jean-Marie Dedecker à l'émission « De Zevende Dag ». « Je ne pense pas gagner trop », a déclaré Siegfried Bracke (N-VA) lors du scandale des pensions. « Eh bien, je le dis au nom de tout le peuple : nous, nous pensons que vous gagnez trop ! », a rétorqué Raoul Hedebouw, président du PTB.
Des responsables politiques qui vivent dans une bulle, coupés de la réalité des gens ordinaires, ça ne peut plus durer. Il leur est beaucoup trop facile de prendre des mesures, souvent contraires à leurs propres promesses électorales, qui frappent le portefeuille des citoyens ordinaires. Les adeptes du self-service, ceux dont la motivation est de se remplir les poches et les spéculateurs n'ont pas leur place dans notre démocratie. Les hommes et femmes politiques doivent se reconnecter à la vie des gens ordinaires. Ils doivent servir le peuple et non se servir eux-mêmes. L'argent public est précieux, il doit être utilisé avec parcimonie. Les représentants politiques doivent être intègres et avoir à cœur l'intérêt général, non pas l'intérêt privé et encore moins leur intérêt personnel.
En 2023, le PTB a révélé les suppléments de pension illégaux. Cette affaire est devenue l'un des plus grands scandales politiques de l'année. Des politiciens se sont versés jusqu'à 1 500 euros de plus que le plafond légal de pension – un montant supérieur à la pension complète de nombreux travailleurs – une fois de plus, c’était la « tournée générale » en politique.
Nous avons d’abord découvert que les ex-présidents de la Chambre Siegfried Bracke (N-VA) et Herman De Croo (Open Vld) ont profité pendant des années de milliers d'euros de primes de pension illégales. Sous la pression de la pétition du PTB demandant le remboursement de chaque euro, De Croo a fini par rembourser tout cet argent. Bracke a préféré tout empocher.
Peu de temps après, le PTB a révélé comment tous les députés pouvaient dépasser la pension maximale légale. Une mesure qui existait dans tous les parlements et que le Vlaams Belang a aussi approuvée. « Alors que le Vlaams Belang contribue à l'organisation de la culture des privilèges, le PTB veille à son abolition », a déclaré à raison Jos D’Haese, chef de groupe PTB au Parlement flamand. N-VA, Vooruit, Open Vld, cd&v, Groen, Ecolo, PS, MR, Vlaams Belang (VB) : tous sont impliqués dans le scandale des pensions.
Cela a pris du temps – les politiciens sont moins enclins à économiser leurs propres sous que ceux de la population – mais ces suppléments de pension illégaux ont fini par être abolis. À partir de 2024, des centaines d'anciens députés recevront des millions de moins en pensions illégales. Cela, grâce au PTB, seul parti qui s'oppose à la culture des privilèges.
Nous voulons aussi nous attaquer à un autre privilège des députés. Nous supprimerons complètement les très chères indemnités de départ des parlementaires. Les députés sortants touchent actuellement des indemnités s'élevant jusqu’à des centaines de milliers d'euros, sous prétexte que les hommes et femmes politiques n'ont pas droit aux allocations de chômage. C'est l'exemple par excellence du self-service financier aux frais des contribuables.
Plus généralement, nous voulons nous attaquer aux hauts salaires et aux privilèges de la caste politique. Nous réduirons de moitié les salaires des ministres et des parlementaires.
Nous avons déposé cette proposition à plusieurs reprises ces dernières années, mais elle a systématiquement été rejetée. La ministre de l'Intérieur Annelies Verlinden (cd&v) l'a même qualifiée de « race to the bottom » (nivellement vers le bas). « Nous ne participons pas à cette surenchère », a déclaré Barbara Pas du Vlaams Belang. Mais l'idée n’est pas totalement tombée dans l'oreille d'un sourd. En 2022, le Premier ministre Alexander De Croo, le dixième chef de gouvernement le mieux payé au monde, a annoncé une réduction de 8 % des salaires des ministres. Il a appelé cela « la sobriété politique ». En réalité, seules certaines indexations ont été annulées, mais, grâce à son travail dans l’opposition, le PTB fait peu à peu mûrir l'idée que les représentants politiques gagnent beaucoup trop.
La réduction de moitié des salaires et la suppression des indemnités de départ s'inscrivent dans le cadre d'une révision générale du statut des représentants politiques. En 2023, le PTB a déposé une proposition pour un nouveau « statut démocratique pour les représentants politiques » simultanément dans tous les parlements de Belgique. Nous soumettrons dorénavant les députés au même régime que les citoyens ordinaires. Les députés travailleront sous un statut normal de travailleurs et bénéficieront donc des mêmes avantages sociaux en cas de maladie, de chômage ou de pension.
Nous supprimerons les caisses de pension spéciales des parlementaires et confierons au Service fédéral des pensions la gestion des pensions des représentants politiques. Une réglementation identique à celle d'un travailleur remplacera le salaire garanti à 100 % pour les hommes et femmes politiques malades de longue durée. Au lieu d'indemnités de départ, les ex-élus à la recherche d'un emploi pourront demander des allocations de chômage. Nous soumettrons à l'impôt tous les revenus des responsables politiques. La pratique actuelle consistant à déguiser une partie de leurs revenus en un « défraiement » très élevé, qui dépasse les 2000 euros par mois, mais n'est pas imposable, sera définitivement interdite. Nous ramènerons également à des proportions raisonnables les indemnités supplémentaires pour les fonctions parlementaires spéciales (président ou vice-président du Parlement, président de commission, chef de groupe, etc.), qui font aujourd’hui doubler la rémunération de certains parlementaires.
Quant aux rémunérations provenant d'autres activités ou mandats professionnels, nous instaurerons un plafond absolu pour les mandataires politiques. Nous fixerons ce plafond à trois fois le salaire médian.
Le système actuel de dotation place les partis sous perfusion de l’État. Chaque année, 78 millions d'euros partent dans les caisses des partis. Il est frappant de constater que les partis qui s'opposent le plus fortement à « l'ingérence du gouvernement » sont ceux qui bénéficient le plus des subventions. Les libéraux du nord du pays, l’Open Vld, tirent 95 % de leurs revenus du gouvernement tandis que les libéraux francophones du MR, 81 %. Pour le Vlaams Belang, c’est 90 %, et pour la N-VA 89 %. Ces partis parasitent les caisses de l'État. Ils vivent aux crochets des contribuables, mais pas dans le même monde qu'eux.
Sur ce plan, le PTB constitue une exception. Nous sommes un parti de membres actifs et, au cours de la législature actuelle, nous tirons la moitié de nos revenus des cotisations de nos membres, des dons, des rétrocessions et des jetons de présence. C'est un modèle dont nous sommes fiers. Nous organisons activement un dialogue permanent avec notre base. Jour après jour, les membres et les bénévoles renforcent notre parti et enrichissent notre fonctionnement démocratique. C'est un monde de différence avec les autres partis qui n'ont aucune raison de se préoccuper des citoyens en dehors des campagnes électorales. Une fois les élections terminées, leurs portefeuilles seront à nouveau remplis. C'est ainsi que fonctionne aujourd'hui le financement des partis.
Les partis politiques jouent un rôle crucial dans la démocratie parlementaire. Les dotations peuvent être un moyen de renforcer la démocratie, mais le système actuel est l'expression d'une culture de profiteurs et du self-service. Il doit être entièrement transformé. Le PTB veut réformer le financement des partis et créer un nouveau système démocratique, transparent et équitable.
Nous sommes convaincus qu'un financement intelligent des partis peut conduire à un système plus démocratique et plus transparent. Pour ce faire, nous avons trois propositions simples.
Tout d’abord, nous voulons que le parlement fixe annuellement l'enveloppe disponible pour subventionner les partis politiques. Aujourd'hui, le financement des partis est un dédale dans lequel même des experts chevronnés ne s'y retrouvent pas. Ce montant maximum doit au contraire être déterminé de manière ouverte et transparente, de façon à ce que la population puisse toujours savoir exactement combien le gouvernement dépense.
Chaque année, le PTB soumet à nouveau sa proposition visant à réduire de moitié le financement des partis. Et, chaque année, cette proposition est rejetée. Plusieurs personnalités des partis de la majorité fédérale et de la N-VA ont pourtant dénoncé à diverses reprises le fait que les partis recevaient trop d’argent, mais lorsqu'il s'agit de passer à l'acte, ils refusent de joindre le geste à la parole. Fin 2022, le Premier ministre De Croo a lancé une idée : geler le financement des partis au niveau de septembre 2022. Ce n'était que 5 % d'économies, mais, au moins, les dotations n'augmenteraient pas en 2023. Il s'est rapidement avéré qu'il s'agissait là aussi d'une promesse vide de sens. L'indexation a immédiatement réduit à néant ces économies. Ainsi, la dotation fédérale a augmenté de 1,1 million d'euros en 2023 pour atteindre un niveau sans précédent.
Il n'y a apparemment pas beaucoup de volonté politique pour toucher au financement des partis. L'accord gouvernemental de la Vivaldi n'en mentionne même pas le montant total. Il a certes été promis de réformer le système « notamment en renforçant la transparence et le contrôle des recettes et des dépenses ». Mais même cette ambition, minime en soi, est restée lettre morte. Les mesures antisociales sont généralement prises du jour au lendemain, mais lorsque les responsables politiques doivent eux-mêmes céder quelque chose, ils multiplient les tactiques pour faire traîner les choses. Avis, rapports, auditions... tout est bon pour éviter d'avoir à décider.
Toutefois, il ne s'agit pas seulement de réduire les subventions aux partis, mais aussi d'améliorer le système. C'est pourquoi nous instaurerons également un principe de « matching funds » (« fonds de contrepartie »). Le concept est assez simple : les partis doivent assurer leurs propres revenus (cotisations des membres, dons de citoyens, rétrocessions et jetons de présence) en proportion du financement public qu'ils reçoivent. Ainsi, nous ferons en sorte que les partis redeviennent plus proches de leurs électeurs. Si les partis dépendent des citoyens pour une partie de leurs moyens, ils seront également plus prudents avec leurs finances. En effet, les membres voudront garder un œil sur la façon dont leur argent est dépensé.
Aujourd'hui, ce système de « matching funds » existe déjà dans plusieurs pays. En Allemagne par exemple, pour chaque euro de soutien ou de cotisation, un parti reçoit un euro du gouvernement. Bien entendu, des garanties suffisantes doivent être mises en place pour empêcher les grandes entreprises et les grosses fortunes d'acheter leur influence sur le processus politique. Nous luttons contre la corruption, les magouilles et les conflits d'intérêts. La crainte que le principe de matching funds nous conduise à des situations à l’américaine où les multinationales dictent la politique n’est pas fondée. Dans le modèle que nous préconisons, un parti se construit à partir de petits dons et de cotisations de citoyens ordinaires.
Dans notre pays, les grands partis sont invariablement favorisés par rapport aux petits lorsqu'il s'agit de financement. Actuellement, seuls les partis qui siègent au parlement reçoivent une dotation. Nous voulons également donner une chance aux nouveaux partis et aux nouvelles idées. Cela pourrait se faire, par exemple, en remboursant une partie des frais de campagne lors des élections.
Il y a plus de vingt ans, les partis traditionnels ont instauré un seuil électoral de 5 % pour conserver leur pouvoir. Nous instaurerons un système électoral entièrement proportionnel. Nous abolirons le seuil électoral antidémocratique de 5 %, qui est aujourd'hui également de facto le seuil pour le financement des partis.
Lorsque les partis sentent le pouvoir leur filer entre les doigts, ils font tout ce qu’ils peuvent pour maintenir leur position et, surtout, conserver les moyens qui vont avec. Pour ce faire, ils n'hésitent pas à changer les règles du jeu de la démocratie. Par exemple, les partis majoritaires flamands (N-VA, Open Vld et cd&v) ont supprimé l’obligation de vote aux élections communales. « Ainsi, la démocratie devient vraiment une fête », s’est réjouie Gwendolyn Rutten (ex-présidente de l'Open Vld) lors de la suppression de l’obligation de vote. Toutefois, les études montrent que ce sont les personnes qui ont été le moins longtemps scolarisées et à faible revenu qui, le plus souvent, ne votent pas. La démocratie devrait en effet être une fête. Une fête en mémoire des nombreuses décennies de lutte sociale pour le droit de vote. Cela, on le fête en rendant le processus démocratique aussi riche et représentatif que possible. Les voix du plus grand nombre possible de personnes doivent être entendues. La suppression de l'obligation du vote va directement à l'encontre de ce principe.
Par ailleurs, tous les partis figurant sur les listes électorales devraient avoir un accès égal aux médias, à l'exception de ceux qui propagent le racisme et la haine. En raison de l'absence de règles du jeu égales pour tous dans les grands médias, le PTB fait l'objet d'une couverture proportionnellement bien moindre. Des études montrent qu'en 2020, notre parti a reçu moins de 0,5 % du temps de parole total des partis flamands, tant sur la VRT que sur VTM. C'était toujours le cas dans les émissions d'information de la VRT en 2021. Dans les programmes de débats, notre temps de parole était de 2,7 %, soit encore moins que le MR qui, pourtant, ne se présente même pas en Flandre. Le PTB est également sous-représenté dans les médias francophones. Dans les journaux francophones, Raoul Hedebouw apparaît par exemple six fois moins que le président du MR Georges-Louis Bouchez. Sur les radios matinales francophones, le PTB est presque cinq fois moins invité que le PS et le MR, presque quatre fois moins qu'Ecolo.
Tant que ce déséquilibre persiste, nous devons en tant que parti chercher d'autres canaux, tels que les médias sociaux, pour exprimer clairement notre point de vue et communiquer avec notre base et le grand public. La proposition d'Ecolo-Groen (soutenue par Vooruit, le PS, le cd&v et l’Open Vld) de plafonner les dépenses de communication constituerait aussi un obstacle à cela. En outre, la droite (extrême) est particulièrement active en ligne. Nous ne pouvons donc pas leur abandonner cet espace. Nous devons lutter contre leurs discours de haine sur tous les terrains possibles, y compris sur les médias sociaux.
Le plafonnement des dépenses de communication ne fait que confirmer l'inégalité de traitement dans les grands médias. Cela tue le débat dans l’œuf. Les experts sont également de cet avis. Ainsi, Gunter Vanden Eynde, chercheur à la KULeuven, a constaté qu'un plafond « accroît l'avantage concurrentiel des partis traditionnels et des candidats ayant un bon accès aux médias traditionnels et au marché régulier de la publicité ».
En Belgique, mais aussi au niveau européen, il est courant que des mandataires politiques de haut niveau, de hauts fonctionnaires ou des membres de cabinet rejoignent le conseil consultatif d'une grande entreprise ou d'une banque. Parfois, il arrive qu’ils deviennent eux-mêmes lobbyistes pour des multinationales au terme de leur mandat. Inversement, les lobbyistes et les cadres des grandes entreprises sont directement intégrés dans les cabinets ministériels, voire dans les gouvernements. Ce sont les fameuses « portes tournantes » entre le monde politique et celui des grandes entreprises. Elles constituent de graves menaces pour la démocratie.
On ne compte plus les exemples flagrants. L’ancien commissaire européen au Commerce Karel De Gucht a travaillé pour ArcelorMittal et Proximus une fois son mandat politique terminé. Le député européen Guy Verhofstadt (Open Vld) combine son siège au Parlement européen avec un poste chez Sofina, le holding financier de la famille Boël, issue de la noblesse et active dans les affaires. En plus des 217 000 euros qu'il gagne en tant que député européen, la famille Boël lui verse 100 000 euros par an pour sa participation à certaines réunions.
Les portes tournent cependant aussi dans l'autre sens. Prenons l’exemple de la secrétaire d'État au Budget Alexia Bertrand (Open Vld). Elle est la fille et l'héritière de Luc Bertrand, qui fait partie de la 19e famille la plus riche du pays. Cette famille est l'actionnaire historique de Ackermans & van Haaren, qui pèse 1,7 milliard d'euros. Pendant des années, elle a elle-même été administratrice de ce puissant holding, actif dans le secteur bancaire (Delen Private Bank et Banque Van Breda) et ayant des intérêts importants dans les secteurs de la construction et du dragage.
Le cas d'Annick De Ridder (N-VA) est également un modèle du genre. En tant que députée flamande de l'Open Vld et directrice de l'Autorité portuaire d'Anvers, elle a entretenu des liens étroits avec le milliardaire anversois Fernand Huts, patron de Katoen Natie, très actif dans le port d'Anvers. En 2011, De Ridder a quitté la politique anversoise pour rejoindre cette entreprise en tant que consultante. « Pour apprendre comment pensent les entrepreneurs », a-t-elle dit. Elle a toutefois continué à siéger au Parlement flamand. À peine deux ans plus tard, elle est passée à la N-VA. À ce propos, Fernand Huts aurait déclaré : « Quand elle a été prête pour l'action politique, j’en ai fait cadeau à Bart De Wever ». Aujourd'hui, Annick De Ridder siège au Parlement flamand et est échevine en charge du port à Anvers.
On ne sait pas encore où les membres du gouvernement Vivaldi et leurs collaborateurs des cabinets se retrouveront après les prochaines élections. La composition des cabinets de la Vivaldi montre toutefois que les portes tournantes ont fonctionné à plein régime. Tout porte à croire que ce sera encore le cas à la fin de la législature. Le Premier ministre De Croo a intégré dans son cabinet l'économiste en chef de l'organisation patronale FEB. L’ex-ministre de la Justice Van Quickenborne (Open Vld) a fait de même avec un conseiller du VOKA (organisation patronale flamande). Au sein du cabinet de la ministre de l'Énergie Tinne Van der Straeten, huit des douze membres du cabinet travaillant sur l'énergie sont issus du secteur privé. Un nombre important de collaborateurs étant passé par les secteurs du diamant et de la banque ont trouvé un poste auprès des ministres Van Peteghem (cd&v) et Van Quickenborne. Le cabinet du ministre de l'Économie Pierre-Yves Dermagne (PS) emploie de nombreux collaborateurs issus du secteur des assurances. Au cabinet du ministre flamand des Médias Benjamin Dalle (cd&v), c’est un ancien juriste de DPG Media (la société de médias du milliardaire Van Thillo qui gère la chaîne de télévision VTM et le quotidien Het Laatste Nieuws) qui définit la politique. Dans tous les cabinets, on trouve des collaborateurs qui travaillaient auparavant dans des sociétés privées de consultance comme Deloitte, Ernst & Young, KPMG, PwC et McKinsey, connues pour leurs politiques néo-libérales. Par ailleurs, le secrétaire d'État Thomas Dermine (PS) est lui-même issu de l'écurie McKinsey.
Les cabinets deviennent ainsi un foyer de possibles conflits d'intérêts. Les lobbyistes des grandes entreprises et des grosses fortunes sont indirectement ou directement aux commandes de la politique.
Nous voulons qu’une période tampon de cinq ans soit instaurée après l'exercice d'un mandat public important. Pendant cette période, un ministre, un député, un chef de cabinet ou un chef de cabinet adjoint ne devrait pas avoir le droit de travailler en tant que membre de la direction, membre du conseil d'administration ou d'un conseil consultatif ou en tant que consultant dans des banques, des multinationales ou des sociétés cotées en bourse. Le PTB a déposé une proposition de loi à ce sujet.
Porter deux casquettes importantes en même temps est à proscrire totalement. Il est moralement indéfendable que des ministres, des dirigeants provinciaux ou communaux exercent des mandats rémunérés dans des banques, des multinationales ou des sociétés cotées en bourse. On travaille soit pour la collectivité, soit pour des intérêts privés, mais pas pour les deux en même temps. Les députés et leurs collaborateurs ont une responsabilité sociale. Des séparations bien marquées entre les différents types de pouvoir sont indispensables. C'est le seul moyen d'éviter une concentration des pouvoirs.
Il y a également des choses qui ne vont pas dans le fonctionnement des cabinets. Il est logique qu'un ministre soit aidé par une petite équipe de collaborateurs. Mais, aujourd'hui, on est dans une totale démesure. La Belgique compte aujourd'hui plus de 2000 membres de cabinet pour 46 ministres et 8 secrétaires d'État. Ces cabinets gigantesques et opaques coûtent extrêmement cher. La facture des cabinets de la Vivaldi a augmenté de 22 % par rapport au gouvernement précédent : elle est passée de 54 à 66 millions d'euros. En outre, les ministres et leurs cabinets commandent constamment des études extrêmement coûteuses au secteur de la consultance, qui est souvent l'ancien employeur de nombreux membres de ces cabinets.
Fin mai 2023, on a appris que le gouvernement flamand avait versé pas moins de 1,5 milliard d'euros à des cabinets de consultance externes au cours de cette législature. Plus tard, le ministre-président Jan Jambon a évoqué un chiffre de « seulement 640 millions d'euros ». Il est incroyable qu'un gouvernement qui se prétend économe ne sache même pas exactement combien d'argent il dépense en consultants. « Même les 640 millions d'euros dont parle Jan Jambon représentent encore trois fois le montant consacré aux services de consultance il y a deux législatures », a réagi Jos D'Haese, député PTB au Parlement flamand. La députée PTB Lise Vandecasteele a interrogé la ministre flamande du Bien-être, de la Santé publique et de la Famille Hilde Crevits (cd&v) au sujet des missions de consultance de la société “WhoCares?”. Le cabinet Crevits a autorisé cette société à rentrer des factures pour un montant de quelque 2,2 millions d'euros. Détail piquant : Jo Vandeurzen, ancien ministre cd&v du Bien-être et de la Santé publique, travaille en tant qu'indépendant pour “WhoCares?” pour une indemnité journalière de 1 300 euros, soit davantage que ce qu'il gagnait en tant que ministre. Une telle politique de copinage confine à l’absurde. « D’abord, vous économisez 219 millions d'euros en supprimant 1 440 fonctionnaires. Ensuite, vous dépensez 1,5 milliard d'euros pour permettre à des gens qui demandent 1 300 euros par jour de faire exactement le même travail », a souligné le député PTB Jos D'Haese lors du débat au Parlement flamand.
Il est temps de mettre fin à ce gaspillage et d'investir dans des services publics performants. De cette manière, les connaissances nécessaires ne sortent pas de notre administration et de ses agences, et nous nous attaquons aux conflits d'intérêts et à la « politique de l’entre-soi ». Nous voulons également réduire radicalement le nombre de collaborateurs dans les cabinets. Aux Pays-Bas, par exemple, un ministre ne dispose que de quatre collaborateurs. Nous voulons que soit établie une liste des anciens employeurs des collaborateurs de cabinet au cours des cinq années précédant leur nomination, ainsi qu'une liste de toutes les missions de consultance auprès des cabinets. Le gouvernement publiera et mettra à jour ces listes sur son site internet. Lorsque des collaborateurs de cabinet iront travailler dans le privé, l’information sera communiquée publiquement.
Ces dernières années, les scandales politico-financiers se sont accumulés. « La plupart des partis trouvent logique que les responsables politiques appliquent simplement des règles déontologiques entre eux », s'est indigné Raoul Hedebouw, président du PTB. « Or, si une chose est désormais claire, c'est que cet autocontrôle entre politiques ne fonctionne pas. »
Nous ne pouvons pas laisser aux politiques le soin de jouer le rôle d'arbitre. C'est pourquoi nous voulons créer une Haute Autorité pour la transparence politique. Celle-ci sera chargée de vérifier s'il y a suffisamment de transparence, s’il y a des conflits d'intérêts et si la bonne gouvernance est appliquée. L'Autorité pourra formuler des recommandations. En cas de corruption ou de conflit d'intérêts, elle pourra également prendre des mesures très strictes. Si nécessaire, cette autorité lancera une enquête et transmettra un rapport au parquet ou à un ou une juge d'instruction.
Des exemples existent dans d'autres pays. On trouve ainsi, à Barcelone, la Oficina para la Transparencia y las Buenas Prácticas (Office pour la transparence et les bonnes pratiques). Une équipe de 56 personnes y contrôle que la gestion des fonds publics est conforme à la loi. Il existe également une « boîte aux lettres éthique » (« buzón ético », en espagnol) où les fonctionnaires et les habitants peuvent signaler des situations d’abus et de corruption.
De nombreux hommes et femmes politiques assument toutes sortes de mandats rémunérés en plus de leurs fonctions d’élu. Il y a un grand manque de transparence autour de ces revenus. Les citoyens ne peuvent rien savoir au sujet de leur situation financière. C’est malsain. Un ministre détenant des actions dans une entreprise, concurrente d'une entreprise publique par exemple, pourrait être tenté de saboter cette dernière.
Actuellement, les députés et les mandataires politiques doivent fournir des informations sur leur patrimoine sous enveloppe scellée à la Cour des comptes. Nous voulons que les déclarations de patrimoine des mandataires politiques soient rendues publiques. Raoul Hedebouw et Peter Mertens ont déposé une proposition en ce sens au Parlement fédéral. Cette proposition est en parfaite adéquation avec les recommandations du GRECO (Groupe d'États contre la corruption – Conseil de l'Europe).
Nous voulons également ouvrir grand les fenêtres des arrière-salles confinées du monde politique. Il y a eu un énorme manque de transparence par rapport aux suppléments de pension des anciens présidents de la Chambre. Toutes les réunions du Bureau de la Chambre (l'organe directeur de la Chambre dans lequel chaque groupe politique est représenté par deux membres) se déroulent à huis clos. À plusieurs reprises, le PTB a dû demander les procès-verbaux de précédentes réunions du Bureau pour obtenir des éclaircissements sur les manœuvres qui ont mené à ce système. Nous voulons également que le public ait accès à toutes les discussions et décisions au sein du Bureau de la Chambre, ainsi que dans d'autres organes et entreprises de l'État. Les procès-verbaux de leurs réunions devraient être disponibles sur Internet pour tous les députés et le public.
Les réunions d’institutions lors desquelles sont prises des décisions affectant un grand nombre de personnes devraient pouvoir être suivies en direct et en ligne. En février 2023, la cheffe de groupe PTB à la Chambre Sofie Merckx a remarqué que le financement des partis serait discuté dans une salle de commission sans streaming. Elle a pensé qu'il s'agissait probablement d'une coïncidence. Mais, par la suite, le soulagement au sein de la majorité a été évident. « Heureusement qu'il n'y avait pas de streaming », a dit un membre de cette majorité à un collègue. Ce qu'ils n’avaient toutefois pas vu, c'est qu'il y avait aussi deux journalistes dans la salle, qui ont ensuite écrit un article relatant la discussion hallucinante en commission où la majorité a fini par demander à nouveau l'avis d'un expert malgré le fait qu’un rapport volumineux venait d’être publié. Sur quoi exactement aurait dû porter cette nouvelle expertise ? Personne ne s'en est expliqué. Il s'agissait surtout d'une tactique dilatoire de la part d'une majorité qui n'avait pas encore de proposition commune pour une véritable réforme du financement des partis.
Le lobbying intense de l'establishment économique et financier fait également obstacle à la transparence du processus politique. Les grandes entreprises ne lésinent pas sur les moyens pour orienter les décisions politiques en leur faveur. Prenons l'exemple du scandale des SMS entre Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, et son « ami » Albert Bourla, CEO de Pfizer.
L'industrie pharmaceutique a déployé une énorme machine de lobbying pour contrer une levée des brevets sur les vaccins contre le coronavirus. L'organisation de recherche Corporate Europe Observatory a révélé que les grandes firmes pharmaceutiques dépensaient chaque année au moins 36 millions d'euros en lobbying au niveau européen. Elles se sont aussi démenées, avec succès, pour empêcher les pays pauvres d'avoir accès à la production de vaccins. Il s'agit d'un exemple concret de la manière dont ces entreprises tentent d'influencer les parlements et du manque total de transparence de ces pratiques.
Les révélations du Corporate Europe Observatory ont été l’occasion pour le PTB d’examiner de près le lobby pharmaceutique dans notre pays. Le registre actuel des lobbyistes de la Chambre ne contient qu'une liste de lobbyistes agréés. Cette liste comprend moins de 100 entreprises, dont l'Antwerp World Diamond Centre, NewPharma, Engie-Electrabel, Proximus, ING Belgique, Assuralia et AB Inbev. Qui ces lobbyistes rencontrent, la fréquence de leurs entrevues avec les députés et les sujets abordés au cours de ces entretiens : rien de cela n’est consigné. En d'autres termes, les informations contenues dans ce registre des lobbys ne permettent en rien de comprendre comment les groupes politiques sont influencés. Le registre actuel des activités de lobbying n'a donc aucune valeur.
Il arrive souvent que des parties entières de texte de proposition de loi soient des copiés-collés du texte fourni par un lobby. Si c’est le cas et que des lobbyistes ont rédigé tout ou une partie de la législation pour le gouvernement ou les députés, cela doit être signalé. Pour obtenir la clarté sur ce sujet, le PTB a déposé une proposition de loi visant à établir un registre des lobbys, avec un contrôle public sur son introduction et sa mise en œuvre, ainsi que des sanctions en cas de non-respect.
C'est la seule manière d'empêcher les grandes entreprises de manipuler les travaux du gouvernement et les débats parlementaires à leur profit. C'est le cas, par exemple, de l'accord secret que le gouvernement actuel a conclu avec Engie lors des négociations sur la prolongation des réacteurs nucléaires. Depuis 20 ans, c’est Engie qui décide et le gouvernement met en œuvre ces décisions. Une poignée d'actionnaires a plus de pouvoir que tous les ministres de l'Énergie réunis. Nous voulons rendre cette influence visible pour le grand public.