Migrations et réfugiés
Nous voulons briser le grand tabou qui entoure le débat sur les réfugiés et la migration : s’attaquer aux causes qui poussent les gens à fuir leur pays, la guerre ou le pillage économique. Nous avons également besoin d’un véritable plan européen de répartition des réfugiés, respectueux du droit international. Certaines entreprises profitent des travailleurs sans papiers ou ayant moins de droits pour les exploiter et les mettre en concurrence avec les autres. Nous n’acceptons pas ce dumping social.
Les migrations ont toujours existé. Les gens se déplacent, déménagent, trouvent l’amour ou le travail de leurs rêves dans un autre pays... Cʼest tout à fait normal. Aujourd’hui, de plus en plus d’autres raisons poussent les gens à émigrer. Ils n’ont souvent pas d’autre choix. En 2023, selon les Nations unies, 114 millions de personnes à travers le monde étaient des réfugiés. Un triste record. Ce chiffre cache d’innombrables récits de souffrance humaine : la guerre, l’oppression, la violence, les persécutions, la sécheresse, les catastrophes naturelles et le cercle vicieux de la pauvreté. Si leur accueil n’est pas géré correctement, cela engendre de nouvelles tragédies. Pour les réfugiés eux-mêmes, mais aussi pour l’environnement dans lequel ils se retrouvent.
Le PTB souhaite apporter des solutions réalistes et humaines à ces défis. Cela requiert un débat serein, rationnel et basé sur des faits. Nous nous opposons aux partis qui se livrent à des petits jeux politiques. Nous combattons le racisme de l’extrême droite, qui présente chaque réfugié et chaque migrant comme un profiteur ou un criminel. Ces discours ne servent qu’à monter les gens les uns contre les autres. La grande majorité des gens veulent tout simplement pouvoir vivre, travailler et contribuer à la société en toute sécurité. La politique doit rendre cela possible, dans l’intérêt de tous.
Terminologie :
- Un « réfugié » est un migrant forcé, quelqu’un qui fuit pour échapper à un danger. 70 % des réfugiés restent dans leur région d’origine dans un premier temps. Ils ne cherchent généralement à rejoindre l’Europe que dans un second temps, lorsque l’accueil dans leur propre région est impossible ou trop dangereux. Le droit international stipule que les personnes qui fuient un danger aigu tel qu’une guerre ou des persécutions en raison de leur appartenance ethnique, de leur religion, de leurs opinions politiques ou de leur orientation sexuelle (« réfugiés politiques ») ont droit à une protection dans un autre pays : le droit d’asile.
- Un « demandeur d’asile » est un réfugié qui, en vertu du droit international, cherche à obtenir une protection (« asile ») auprès des autorités d’un autre pays. Une enquête permet de décider au cas par cas si cette personne a droit à l’asile ou non. Cela peut prendre plusieurs mois. Pendant la durée de l’enquête, le demandeur d’asile n’a droit qu’au strict nécessaire (le gîte et le couvert). En théorie du moins : dans les faits, de nombreux demandeurs d’asile dorment dans la rue parce que les autorités ne fournissent pas suffisamment de places d’accueil.
- Un « réfugié reconnu » est une personne à qui l’asile a été accordé. En Belgique, c’est le Commissariat général aux réfugiés et aux apatrides (CGRA) qui juge si une personne doit être reconnue ou non. Conformément au droit international, les réfugiés reconnus ont les mêmes droits et obligations que les nationaux. Rien de plus, rien de moins. Bien que les réfugiés fassent l’objet d’une grande attention médiatique, ils ne représentent en réalité que 10 % du nombre total de nouveaux arrivants.
- Un « travailleur migrant » arrive dans notre pays de manière légale afin d’y travailler. Soit il est détaché en Belgique par une entreprise étrangère, soit une entreprise belge lui fournit un permis de travail et un permis de séjour temporaire. Contrairement à l’image souvent véhiculée, il s’agit d’une des formes de migration les plus fréquentes : près d’un quart des nouveaux arrivants sont des travailleurs migrants. Neuf sur dix sont originaires de l’Union européenne.
- Les « sans-papiers » sont des personnes qui vivent ici pour des raisons diverses, mais n’ont aucun permis de séjour. Quand on parle d’« illégaux », c’est à ce groupe que l’on fait référence. Ce ne sont toutefois pas les personnes elles-mêmes qui sont « illégales », mais le fait qu’elles n’aient pas de titre de séjour. Les raisons peuvent varier : certains sont restés après l’expiration de leur permis de travail temporaire, d’autres ont demandé l’asile mais ne l’ont pas obtenu, d’autres encore sont venus dans le cadre d’un échange étudiant et sont restés après leurs études... Quoi qu’il en soit, la grande majorité des sans-papiers vivent ici depuis longtemps. En Belgique, on estime leur nombre entre 120 000 et 150 000 personnes. Alors que la plupart d’entre eux travaillent et contribuent au fonctionnement de la société, souvent sur des chantiers de construction, dans des cuisines de restaurants ou en tant que chauffeurs Deliveroo, ils n’ont aucun droit dans notre pays (à l’exception de l’aide médicale urgente).
Nous voulons briser le grand tabou qui entoure le débat sur les réfugiés : celui des causes qui les poussent à fuir leur pays. Tant que ces causes existeront, il y aura des réfugiés. Personne ne prend la décision de tout quitter sur un coup de tête. « Personne ne quitte sa maison, à moins d’habiter dans la gueule d’un requin », écrit la poétesse britannique Warsan Shire, qui a elle-même fui la guerre en Somalie avec ses parents.
Au niveau mondial, la guerre reste la principale cause d’exil des populations. En Belgique également, la plupart des demandeurs d’asile sont des réfugiés de guerre : les trois principaux pays d’origine sont la Syrie, l’Afghanistan et la Palestine. Les guerres qui font rage dans ces pays ont été au moins en partie causées ou exacerbées par les actions de la Belgique et de l’Union européenne. Si nous voulons réduire le nombre de personnes forcées de quitter leur pays, nous ne pouvons donc pas fuir ce débat.
Les réfugiés ne sont souvent que le révélateur de notre politique étrangère. Ces quinze dernières années, notre pays a participé à la guerre dévastatrice en Libye (qui a eu des conséquences désastreuses pour de nombreux pays africains comme le Mali, le Tchad et le Niger), a contribué à l’occupation militaire américaine de l’Afghanistan, a fourni des armes à l’Arabie saoudite pour équiper les groupes rebelles djihadistes en Syrie et a largué des centaines de bombes sur l’Irak et la Syrie. La Belgique a par ailleurs toujours entretenu des rapports avec le régime d’occupation israélien. L’armée belge a également été déployée dans diverses régions d’Afrique, notamment au Mali. En ce qui concerne les initiatives de paix, en revanche, notre pays s’est montré très peu actif.
Tous les partis traditionnels portent une part de responsabilité. Tous, à l’exception du PTB, ont voté pour le bombardement de la Libye en 2011. Et certains refusent d’en tirer les leçons qui s’imposent. Les mêmes membres de la N-VA et du Vlaams Belang qui soutiennent aujourd’hui la guerre d’Israël contre les Palestiniens, comme s’il s’agissait de défendre la « lumière », pousseront des cris d’orfraie contre les personnes qui cherchent à fuir l’enfer de Gaza pour se rendre en Europe.
Une politique étrangère axée sur la paix et la stabilité est non seulement plus juste, mais elle contribue également à réduire le nombre de personnes qui fuient. Nous n’avons nullement besoin d’envoyer des troupes ou des missiles à l’autre bout du monde pour assurer notre sécurité. Nous voulons appliquer le principe de non-ingérence en dehors de nos frontières. Nous cesserons par ailleurs toute coopération militaire avec les régimes qui mènent ou financent des guerres comme Israël en Palestine, l’Arabie saoudite au Yémen et le Rwanda dans l’est du Congo.
Nous axerons notre politique étrangère sur la médiation et le soutien aux négociations de paix régionales. Nous renforcerons le corps diplomatique professionnel : la diplomatie évite et met un terme aux guerres. Cette diplomatie reposera sur le droit international et respectera l’intégrité territoriale et la sécurité de tous les pays. Nous mettrons tout le poids de la diplomatie européenne au service d’un cessez-le-feu à Gaza et en Ukraine et nous nous appuierons là-dessus pour ouvrir de véritables négociations de paix. Nous respecterons l’égalité des nations en tant que base de la coopération entre les États et en finirons avec le « deux poids, deux mesures » de la politique européenne.
Plus loin dans le classement des dix premiers pays d’origine des demandeurs d’asile en Belgique, on retrouve cinq pays africains présentant des niveaux de pauvreté élevés. Après la guerre, l’absence de perspectives d’avenir et de moyens de subsistance est en effet la principale raison qui pousse les gens à quitter leur pays. Nous devons en premier lieu nous attaquer au pillage de l’Afrique et des autres régions du Sud global par les multinationales occidentales.
L’Union européenne et ses États membres participent au cercle vicieux de la pauvreté qui sévit dans de vastes régions d’Afrique. L’Union européenne finance par exemple directement la surpêche dans les eaux sénégalaises. En novembre 2020, le Parlement européen a approuvé le renouvellement de l’accord de pêche controversé entre l’UE et le Sénégal. L’UE subventionne à hauteur de milliards d’euros les contrats de pêche des grands bateaux français, espagnols et portugais pour leur permettre d’accéder aux eaux sénégalaises. Cette surpêche ne laisse guère de poissons aux locaux, qui n’ont en outre aucune chance face aux navires européens bien mieux équipés. Nombre d’entre eux sont donc forcés de suivre le poisson qui leur a été volé et de chercher en Europe des emplois leur permettant de survivre. Alors que l’Union européenne pille les mers du Sénégal, les Sénégalais n’ont que peu de chances d’obtenir l’asile et finissent le plus souvent dans l’illégalité. Nous voulons mettre un terme à cette hypocrisie européenne. Cela commence par une politique de pêche durable et respectueuse des pêcheurs locaux.
Autre exemple : celui de la multinationale néerlando-britannique Shell, qui effectue des forages pétroliers dans le delta du Niger, au Nigeria, depuis 60 ans. D’après la loi, les compagnies pétrolières sont tenues de nettoyer la pollution qu’elles engendrent, mais dans la pratique, Shell ne le fait pratiquement jamais. L’impact sur les populations locales est pourtant colossal : plus d’un million de personnes ont subi des dégâts dans leurs champs, leurs étangs de pêche et leurs habitats. Un rapport des Nations unies a été publié en 2011. Il demandait à Shell de nettoyer cette vaste zone polluée et d’indemniser les victimes. Mais Shell s’en moque éperdument. En 2020, une étude conjointe d’Amnesty et d’autres ONG a révélé que moins de 11 % des zones polluées identifiées dans le rapport de l’ONU avaient été traitées. Pratiquement aucune compensation n’a en outre été versée. En 2020, le Nigeria figurait parmi les dix premiers pays d’origine des réfugiés arrivant dans l’Union européenne : merci, Shell. Mais au lieu d’obliger la multinationale à prendre ses responsabilités, l’Union européenne la soutient encore un peu plus. Malgré un bénéfice record de 38,5 milliards d’euros en 2022, Shell a en effet reçu une subvention européenne de 150 millions d’euros en 2023. Le Premier ministre néerlandais sortant Mark Rutte serait intervenu personnellement. Ce n’est guère surprenant. Lors de l’investiture du cabinet Rutte III, quatre ministres avaient un un lien avec la compagnie pétrolière. L’impunité de Shell est typique de la façon dont nous, Européens, traitons les crimes commis par nos entreprises dans le Sud. La mentalité coloniale est encore bien vivante.
Nous voulons une politique commerciale qui protège la santé publique, le droit à l’alimentation, les conditions de travail, des salaires équitables et l’environnement. La transparence et le contrôle démocratique sont donc indispensables. Nous prévoyons des sanctions pour les multinationales européennes qui commettent des crimes dans le Sud global, en collaboration avec les autorités des pays concernés. L’accent sera mis sur la réparation des dommages et l’indemnisation des victimes. Nous œuvrerons en faveur d’une loi qui obligera les entreprises basées en Belgique à respecter l’”Agenda pour le travail décent” de l’Organisation internationale du travail (OIT) de l’ONU, pour l’ensemble de leur chaîne de production.
Pour se développer, les pays ont besoin de moyens. Nous respecterons l’engagement de consacrer 0,7 % du produit national brut (PNB) à la coopération au développement, une promesse faite par la Belgique et les autres pays riches en 1970 et une première étape pour remédier aux dégâts laissés par des décennies de pillage colonial. Cet engagement n’a malheureusement jamais été concrétisé.
Nous réaliserons par ailleurs un audit de la dette publique des pays pauvres. En effet, les pays du Sud doivent souvent rembourser des emprunts beaucoup trop lourds par rapport à leur produit intérieur brut. Comment un pays peut-il développer durablement son industrie et ses infrastructures si les ressources dont il dispose pour ce faire sont pillées ou détenues par des multinationales étrangères ? Un audit devra permettre de déterminer quelle partie de la dette est injuste, en répondant notamment à ces questions : l’emprunt a-t-il été contracté sous la pression de la Banque mondiale ou du Fonds monétaire international (FMI) ? A-t-il été souscrit par un dictateur ? A-t-il été conclu dans le contexte de la décolonisation ? L’annulation de cette partie de la dette serait un geste de justice, la réparation d’une injustice. Cette annulation de dette ne pourra pas être compensée par une réduction des budgets alloués à la coopération internationale.
Enfin, un nouveau type de réfugiés a fait son apparition il y a plusieurs années : les réfugiés climatiques. Alors que les pays du Sud sont historiquement les moins responsables du changement climatique, ils sont les premiers et les plus durement touchés par les sécheresses extrêmes, les ouragans de plus en plus violents, les pluies diluviennes qui provoquent des coulées de boue et d’autres catastrophes climatiques. De plus en plus de régions deviennent temporairement ou définitivement inhabitables. Rien qu’en 2022, on comptait 32 millions de réfugiés climatiques dans le monde. Dans un premier temps, ils restent généralement dans leur propre pays. Mais dans les régions déjà touchées par la pauvreté ou la guerre, ils sont de plus en plus nombreux à devoir fuir une seconde fois vers un continent plus sûr. En Afrique, par exemple, de nombreux réfugiés climatiques des pays du Sahel se retrouvent dans des pays de la Côte ouest comme la Gambie, le Sénégal et la Côte d’Ivoire, qui abritent déjà beaucoup de réfugiés. Cela les pousse à aller plus loin, en Europe. Et nous ne voyons que la partie émergée de l’iceberg. Un rapport de la Banque mondiale estime à 216 millions le nombre de réfugiés climatiques d’ici le milieu du siècle.
En plus d’un plan réellement ambitieux et socialement juste de réduction des émissions de gaz à effet de serre, nous devons également aider, dès aujourd’hui, les pays du Sud à mieux se protéger contre les catastrophes climatiques.
Lors du sommet de Dubaï pour le climat 2023, il a été convenu de créer un fonds de solidarité international, mais les financements promis par les pays du Nord, États-Unis et Europe en tête, restent ridiculement bas. Afin de financer ce fonds, nous soutiendrons l’appel du Secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres en faveur d’une taxe mondiale sur les bénéfices des multinationales des énergies fossiles. Pour éviter que le Sud ne rate le train de la transition verte, nous exempterons les technologies vertes essentielles de toute propriété intellectuelle. Nous profiterons ainsi de cette transition pour réduire les inégalités à travers le monde plutôt que d’inaugurer une nouvelle ère de « colonialisme vert » qui entraînerait, entre autres, une augmentation exponentielle du nombre de réfugiés.
À cause des inégalités dans le monde, de nombreux travailleurs originaires de pays où le niveau de vie est moins élevé sont prêts à travailler dans notre pays à des salaires inférieurs et dans de moins bonnes conditions. Certaines entreprises en font avidement usage. En faisant venir une main-d’œuvre étrangère bon marché, elles font par ailleurs pression sur les salaires et les conditions de travail des travailleurs belges. On parle de dumping social. Il en existe deux variantes :
- Le dumping social « légal ». Il concerne surtout les travailleurs détachés de l’Union européenne. En 2022, la Belgique comptait plus de 214 000 travailleurs détachés, dont quatre cinquièmes originaires de pays européens. Le nombre de ressortissants de pays tiers est cependant en augmentation, surtout pour les emplois peu qualifiés.
- L’exploitation des sans-papiers. On estime entre 120 000 et 150 000 le nombre de personnes résidant dans notre pays sans permis de séjour légal et y travaillant. Au noir, donc. Elles sont souvent à la merci de leur employeur et travaillent pour des salaires très bas et dans des conditions dangereuses.
Ces deux formes de dumping social interagissent. Le fait que certaines entreprises européennes recherchent activement une main-d’œuvre bon marché à l’étranger contribue à ce que les migrants qui ne peuvent pas bénéficier de l’asile saisissent cette opportunité de fuir vers l’Europe. Selon le sociologue et expert en migration Hein de Haas, la demande de main-d’œuvre bon marché est le seul « effet d’aspiration » avéré. La tendance de ce type d’immigration dans les pays européens suit en effet celle de la demande de main-d’œuvre supplémentaire du patronat.
Le scandale Borealis a révélé de manière cruelle jusqu’où pouvait aller l’exploitation des travailleurs d’origine étrangère. Pour la construction d’une nouvelle usine dans le port d’Anvers, le géant de la chimie a fait appel à un entrepreneur qui a lui-même fait appel à des sous-traitants qui ont à leur tour fait appel à d’autres sous-traitants. Lors d’un contrôle en 2020, la police a trouvé un total de 174 travailleurs qui avaient été amenés en Belgique depuis la Turquie, le Népal et le Bangladesh par l’intermédiaire de passeurs et avaient été forcés à travailler comme de véritables esclaves modernes. Trente soudeurs hautement qualifiés avaient même été privés de salaire et de logement. Les syndicats et le PTB ont dénoncé cette situation et exprimé leur soutien aux victimes de ce trafic d’êtres humains.
Cette astuce de la chaîne de sous-traitance, comme dans le cas de Borealis, est souvent utilisée dans le secteur de la construction afin de contourner les règles relatives aux conditions de travail et à la sécurité. Après le tragique accident survenu sur le chantier d’une école anversoise en 2021, au cours duquel cinq travailleurs migrants ont trouvé la mort, le secrétaire général du PTB Peter Mertens a révélé que le même entrepreneur principal, Democo, avait engagé pas moins d’un millier de sous-traitants sur un chantier de Gand, principalement de faux indépendants originaires du Portugal, de Pologne, de Slovaquie, de Roumanie et de Slovénie. Dans la pratique, ils servaient d’esclaves salariés. « On joue avec la vie des gens », ont déclaré des collaborateurs. « Lorsque ces bâtiments sont inaugurés, les politiciens et les autorités sont très fiers de venir couper le ruban en fanfare. Ils sont fiers d’y avoir contribué », avait réagi Peter Mertens. « Mais quand ça dérape, on voit le même scénario se répéter, encore et encore. D’abord, ils prétendent ne rien savoir. Ils n’étaient pas au courant. Ensuite, ils commencent à se pointer du doigt les uns les autres. Enfin, ils se taisent et disent qu’il faut laisser les tribunaux faire leur travail. Puis finalement, rien ne change. » Nous voulons réguler au plus vite la prolifération de la sous-traitance. Le donneur d’ordre sera toujours tenu responsable du paiement de l’intégralité du salaire de l’ensemble des travailleurs, quel que soit le nombre de sous-traitants. Les entreprises commanditaires seront responsables de l’ensemble de la chaîne.
La réponse du mouvement ouvrier à toutes les formes de dumping social a toujours été : à travail égal, salaire égal. Ceux qui défendent des idées contraires se trouvent principalement à droite. Lors d’un vote au Parlement européen en 2022 sur l’introduction d’un (modeste) salaire minimum européen – une première étape dans la lutte contre le dumping social –, la N-VA et le Vlaams Belang ont voté contre. Ce premier pas n’était pourtant même pas suffisant. En effet, ce salaire minimum européen est au final inférieur au salaire minimum belge. Et les travailleurs détachés paient des cotisations sociales nettement moins élevées. Nous défendons des droits sociaux égaux pour tous les travailleurs en Europe. Pour toute personne travaillant en Belgique, les conditions salariales et de travail belges doivent s’appliquer dans leur intégralité. Les cotisations sociales doivent être payées dans le pays où le salarié travaille, et non dans le pays d’origine. La Belgique transfèrera ensuite l’argent à l’État membre de l’UE.
Dans la lutte contre l’exploitation des sans-papiers, nous devons regarder la réalité en face. De nombreux travailleurs sans papiers sont actifs non seulement sur les chantiers de construction, mais également dans les secteurs du nettoyage, de l’agriculture, de la santé, de l’hôtellerie et de la sécurité. Le problème n’est pas qu’ils soient ici et travaillent, bien sûr ; ils sont même bénéfiques pour notre économie. Le problème, c’est qu’ils sont obligés de travailler au noir et sans aucune forme de protection sociale. « Ils effectuent les travaux sales, pénibles et dangereux que les Belges ne veulent plus faire », explique Jan Knockaert de Fairwork Belgium. « Le montant de leur salaire dépend de leur couleur de peau. Un Moldave gagne entre 10 et 15 euros de l’heure, ce qui est proche du salaire minimum. Une personne originaire du Maghreb entre 7 et 9 euros et une personne en provenance d’Afrique subsaharienne entre 2 et 5 euros. Et il ne s’agit là que des montants promis. Dans la pratique, il arrive souvent qu’ils ne perçoivent même pas leur salaire. » Cette situation nuit à l’ensemble des travailleurs, avec ou sans papiers. Car quel est l’intérêt pour les syndicats de chercher à négocier de bons accords salariaux si certains employeurs savent qu’ils ne les respecteront de toute façon pas pour une partie de leur personnel ? Quel est l’intérêt pour le mouvement ouvrier de lutter pour l’égalité des droits et des conventions collectives si l’on peut monter ainsi les travailleurs les uns contre les autres ?
Alors que les sans-papiers contribuent au fonctionnement de notre économie, le gouvernement leur tourne le dos. C’est un comble. Dans la pratique, les sans-papiers se voient refuser pratiquement tous les droits humains. Ils paient aux autorités la TVA sur ce qu’ils consomment, comme tout le monde, mais ces dernières font comme s’ils n’existaient pas. Ils n’ont pas droit aux indemnités de maladie, de chômage ni de pension. Ils ne peuvent pas s’adresser aux CPAS. En cas de problème, ils ne peuvent pas appeler la police. Même un rendez-vous chez le médecin est impensable. Ils n’ont droit qu’à l’aide médicale urgente, mais n’osent souvent pas la demander de peur d’être dénoncés. Car s’ils se font prendre, ils se retrouvent en centre fermé et sont expulsés. Cela, même s’ils vivent et travaillent ici depuis des années. Ce fut le cas de Steve Kinmou, un Camerounais qui travaillait depuis six ans dans une grande chaîne de supermarchés à Liège lorsqu’il a été arrêté en 2023. Il avait un contrat à durée indéterminée et participait activement à la vie associative, mais son permis de séjour a expiré après le rejet de sa demande d’asile. Steve a été emmené en centre fermé dans l’attente de son expulsion. Sa famille, ses amis et ses voisins ont protesté. Aucune politique juste et humaine n’est-elle donc possible ?
La secrétaire d’État à l’Asile et à la Migration Nicole De Moor (cd&v) continue d’affirmer que tous les sans-papiers doivent être expulsés du pays, même si beaucoup d’entre eux vivent ici depuis une dizaine d’années voire plus. Même s’ils travaillent et consomment ici. Même si leurs enfants vont à l’école ici et ne parlent pas la langue de leur pays d’origine. L’expulsion de personnes qui contribuent à la société depuis des années sans rien recevoir en retour n’est dans l’intérêt de personne. Dans de nombreux cas, il n’est même pas possible de les expulser. Ces dernières années, par exemple, des Afghans ont reçu l’ordre de quitter le territoire alors qu’il leur était impossible de retourner en toute sécurité dans leur pays d’origine. Les autorités belges elles-mêmes déconseillent en effet tout voyage en Afghanistan. Leur seule option est donc de disparaître des radars. La politique actuelle contraint les gens à la clandestinité et encourage donc le travail au noir, l’exploitation et le dumping social.
Nous voulons que les sans-papiers qui se trouvent ici depuis longtemps puissent sortir de la clandestinité. S’ils ne sont plus obligés de travailler au noir, ils pourront travailler aux mêmes salaires et dans les mêmes conditions que les autres. Nous mettrons ainsi fin à l’exploitation et au dumping social. Cela leur permettra en outre de payer des impôts sur le revenu et des cotisations sociales et de pension, ce qui n’est pas le cas actuellement.
Nous avons pour cela besoin d’une loi claire basée sur des critères objectifs. Aujourd’hui, la procédure de régularisation reste trop arbitraire. Deux personnes ayant le même profil obtiennent souvent des décisions différentes. Nous laisserons l’application de la loi à un comité indépendant composé entre autres de fonctionnaires du SPF Emploi, Travail et Concertation sociale, de syndicalistes et de personnes issues d’organisations de réfugiés reconnues. Les demandes devront répondre à au moins un des quatre critères clairs, transparents et permanents ci-dessous :
- des liens durables avec la Belgique (travail, liens sociaux, connaissances linguistiques) ;
- une procédure d’asile qui dure depuis déjà trop longtemps ;
- une situation humanitaire personnelle sérieuse ;
- un statut de mineur non accompagné.
La plate-forme nationale In My Name, fondée par plus de cent organisations dont des syndicats et des organisations de réfugiés reconnues, a proposé une réforme en profondeur de la législation sur la migration « pour mettre fin à un système qui produit trop souvent et de manière injuste des situations de séjour illégal ». Elle a recueilli plus de 35 000 signatures en faveur d’une proposition de loi citoyenne pour une procédure de régularisation correcte et objective. La secrétaire d’État à l’Asile De Moor a cependant refusé de discuter avec la plate-forme et la proposition de loi n’a même pas été débattue au Parlement.
La régularisation basée sur des critères objectifs est un outil très efficace dans la lutte contre le dumping social illégal. Nous sanctionnerons également les entreprises qui exploitent des sans-papiers et protégerons les travailleurs qui portent plainte.
Les règles européennes (le « règlement de Dublin ») stipulent que le premier pays européen où les réfugiés posent le pied doit les accueillir. Dans la pratique, il s’agit généralement de l’Italie, de la Grèce et de l’Espagne. Mais ce règlement a montré ses limites. Dans de nombreux pays, les conditions d’accueil ne sont pas conformes aux normes, de sorte que les autres États membres ne peuvent pas renvoyer les « Dubliners » dans ce premier pays. En Grèce, plusieurs îles ont été transformées en prisons à ciel ouvert sous la pression de l’Union européenne afin d’empêcher les réfugiés de venir en Europe. Difficilement accessibles à la presse, les camps des îles grecques sont surpeuplés et les réfugiés y vivent entassés dans des conditions déplorables, sans aucun équipement de base comme l’eau courante. En Italie également, les conditions d’accueil sont totalement insuffisantes. Et l’année dernière, tout le monde n’a pas pu être accueilli à temps en Belgique non plus.
Une chose est claire : aucun pays de l’Union européenne ne peut à lui seul apporter une réponse aux personnes nécessitant une protection. Afin que tous ceux qui ont besoin d’une protection l’obtiennent, chaque État membre doit faire sa part. Nous sommes favorables à l’introduction d’un système obligatoire de répartition des demandeurs d’asile entre les États membres de l’Union européenne. Il n’est pas normal que la Grèce et l’Italie accueillent tous les réfugiés arrivant en Europe. Sans répartition équitable, des États membres comme la Hongrie sont récompensés pour avoir fui leurs responsabilités. Nous devons mettre fin à ces abus.
L’establishment européen prétend avoir trouvé la solution sous la forme du nouveau Pacte européen sur la migration (2023). Le Premier ministre Alexander De Croo (Open Vld), comme la plupart des partis de la Vivaldi, a exprimé son soutien et son enthousiasme pour ce pacte. Le pacte mentionne pour la première fois une clé de répartition, mais les pays peuvent « racheter » leurs quotas. Dans la pratique, l’accueil ne sera donc pas uniforme, mais dépendra d’un marchandage entre les États membres qui essaieront de tirer profit, politiquement ou financièrement, de la possibilité d’accueillir ou non des réfugiés.
S’il est néanmoins positif que le Pacte sur la migration tente pour la première fois d’unifier les procédures d’asile au sein de l’Union, la manière dont il le fait est inacceptable. Le pacte prévoit en effet de construire des centres de détention à grande échelle aux frontières extérieures de l’Europe. Les candidats demandeurs d’asile y seraient détenus en masse, en violation des droits humains européens... qui, si l’on en croit les auteurs du traité, ne s’appliquent pas en dehors du territoire de l’Union européenne. Une enquête rapide et donc inévitablement bâclée de quelques jours au maximum permettra de prendre une décision quant aux personnes ayant une chance d’obtenir l’asile et celles qui n’en ont aucune. Les personnes originaires d’une liste de pays jugés « sûrs » n’auraient aucune chance et seraient renvoyées directement. Le pacte contourne ainsi la disposition la plus fondamentale de la Convention de Genève, à savoir que tous les réfugiés ont droit à un traitement individuel de leur dossier. Ce n’est pas parce que l’Union européenne désigne un pays comme sûr (sur la base de critères déjà discutables) qu’il ne peut y avoir de cas individuels nécessitant une protection. L’expérience montre en outre que ceux qui veulent vraiment fuir trouveront toujours un moyen de le faire : si ce n’est pas légalement, ce sera par d’autres voies. En résumé : le nouveau Pacte européen sur la migration n’offre pas de véritables solutions mais poursuit la voie répressive de l’« Europe forteresse » qui nous a conduits à la situation actuelle.
Mais la faille la plus flagrante du Pacte européen sur la migration réside dans ce qu’il ne dit pas : les causes ne sont encore une fois jamais mentionnées. Toutes ces dispositions reposent sur l’hypothèse fictive selon laquelle les gens cesseront soudainement de fuir alors que les guerres, les privations économiques et les catastrophes climatiques ne font qu’augmenter. D’une main, l’Union européenne pille le Sud global et soutient les guerres en Afrique et au Moyen-Orient. De l’autre, elle repousse les populations qui fuient pour ces raisons. En ce sens, le Pacte sur la migration n’offre malheureusement rien de nouveau. L’espoir qu’une poursuite de la politique menée ces dernières décennies produira soudain des résultats différents n’est pas sérieux.
Depuis les années 1990, la politique migratoire de l’UE est de plus en plus axée sur la surveillance, l’édification de murs et les refoulements. Les migrants et les réfugiés sont de plus en plus souvent refoulés à la frontière sans que l’on vérifie s’ils ont droit à l’asile. Cela s’accompagne presque toujours de violences, qui peuvent parfois entraîner la mort. Depuis 2014, l’ONU a dénombré plus de 27 000 décès dans la seule Méditerranée. Le nouveau Pacte européen sur la migration ne fera qu’engendrer de nouvelles tragédies, comme celle des 600 réfugiés qui se sont noyés lorsque les garde-côtes grecs les ont abandonnés sur un bateau en perdition en juin 2023. Ou comme celle des 23 personnes tuées par des agents de sécurité lors d’une émeute dans un centre de détention de Melilla, l’enclave espagnole au Maroc. Voilà ce que la détention aux frontières extérieures signifie dans la pratique. La construction de clôtures et de murs n’est pas la solution. Son coût financier et humain est considérable, et cela ne fera aucunement diminuer le nombre de personnes souhaitant venir ici. Ces dernières prendront juste plus de risques.
Selon le sociologue et expert en migration Hein De Haas, la combinaison de la demande de main-d’œuvre bon marché et de la politique de plus en plus répressive de l’Union européenne est la principale cause de l’augmentation du nombre de sans-papiers : « Depuis les années 1990, la demande soutenue de main-d’œuvre immigrée dans les secteurs de l’agriculture, de la construction et des services dans les pays de destination ne s’est pas accompagnée de possibilités suffisantes de migration légale. Au contraire, des efforts ont été déployés pour empêcher l’arrivée de travailleurs migrants. Cela s’est fait principalement par l’introduction d’exigences en matière de visa pour les travailleurs migrants qui étaient auparavant libres d’aller et venir, ainsi que par l’intensification des contrôles aux frontières. L’écart croissant entre la demande de main-d’œuvre et la politique frontalière a conduit un nombre croissant de migrants à franchir la frontière illégalement ou à rester après l’expiration de leur visa ou de leur permis de travail ». C’est également dans ce contexte que le phénomène de la traite des êtres humains prospère. La mise en relation de la demande des entreprises occidentales et de l’offre de personnes désireuses de fuir est devenue un véritable business.
Nous préconisons la mise en place de procédures européennes sûres et légales afin que les réfugiés puissent demander l’asile en toute sécurité. C'est le seul moyen de lutter efficacement contre la traite des êtres humains, de mettre fin aux noyades en Méditerranée et de respecter le droit d’asile. Cela pourrait se faire par le biais du mécanisme de réinstallation, par exemple : les réfugiés de guerre qui demandent l’asile dans un pays tiers (par exemple les réfugiés syriens au Liban) pourraient être transférés vers différents pays européens selon une clé de répartition équitable. Ce serait la fin du trafic d’êtres humains, des traversées mortelles, des grandes foules arrivant dans les pays du sud de l’Europe et des groupes de migrants errant sous les radars à travers l’Europe en quête de l’asile.
Dans certains cas, le statut de protection temporaire permet de créer une voie sûre. Il s’agit d’une procédure européenne spéciale en cas d’afflux massif de personnes déplacées, avec mise en œuvre d’un plan de répartition solidaire. Grâce à ce statut, les Ukrainiens ont pu fuir en toute sécurité la violence de la guerre et bénéficier automatiquement d’une protection, d’un abri et d’un accompagnement. La procédure existe depuis 2001 mais n’a été utilisée pour la première fois que lors de la guerre en Ukraine. Et ce, alors que les Syriens, les Palestiniens et les Afghans fuient eux aussi la guerre et que le danger et la misère y sont aussi réels qu’en Ukraine. Cette différence de traitement est inacceptable. Nous nous opposons à ce « deux poids, deux mesures ».
Depuis que Maggie De Block (Open Vld) est devenue secrétaire d’État à l’Asile et à la Migration en 2011, notre pays semble confronté à un manque permanent de places d’accueil pour les demandeurs d’asile. Ce n’est pas tant l’imprévisibilité des flux migratoires qui est en cause. À l’exception de quelques pics et creux, le nombre de demandes d’asile a en effet fluctué entre 30 000 et 40 000 par an pendant toute cette période. La véritable raison est que Mme De Block, et plus encore son successeur Theo Francken (N-VA), ont pris la mauvaise habitude de fermer des places d’accueil à chaque baisse temporaire des demandes d’asile. Les initiatives locales d’accueil (ILA), en particulier, ont été fortement réduites alors qu’elles sont plus faciles à créer que les grands centres d’hébergement et préparent mieux à l’intégration. Lorsque le nombre de demandes augmente à nouveau quelques semaines ou mois plus tard, il faut alors se lancer dans une recherche de nouveaux lieux afin d’ouvrir un centre d’accueil. Le nombre de places d’accueil ne cesse d’augmenter et de diminuer, tel un yo-yo. À chaque fois, le manque de places contraint des gens à dormir dans la rue, ce qui a des conséquences désastreuses.
Theo Francken a donné une explication idéologique à cette politique : il a affirmé que cela éviterait un « appel d’air ». Dans la pratique, Sammy Mahdi et Nicole De Moor (cd&v) fondent leur politique sur la même hypothèse. Mais cette théorie de l’appel d’air n’a jamais été véritablement prouvée, et plusieurs études la contredisent. Les conditions d’accueil dans les différents pays d’Europe ne sont pas connues des pays du Sud global. Et les personnes qui fuient vers l’Europe ne viennent pas ici pour rester dans un centre d’asile. Elles recherchent avant tout un pays sûr pour vivre et travailler. Le seul effet d’aspiration avéré, comme nous l’avons mentionné, est la demande de main-d’œuvre bon marché, donc le dumping social organisé par le patronat.
Nous refusons cette politique de yo-yo et l’état de crise permanente organisé. Nous rendrons aux initiatives locales d’accueil la place qu’elles méritent et veillerons à ce que Fedasil dispose de davantage de sites de réserve pouvant être mis à disposition lorsque le seuil est dépassé. Cela évitera les négociations politiques avec d’autres ministres ou bourgmestres sur les lieux d’accueil. Nous conclurons également des contrats-cadres avec des fournisseurs afin d’éviter de repartir de zéro à chaque fois que l’on crée des places d’accueil. Dans la mesure du possible, nous ferons en sorte que les centres d’accueil de réserve soient situés dans des endroits bien desservis par les trains en direction de Bruxelles afin de faciliter la procédure d’asile et d’offrir un meilleur accès au travail, à la vie associative, aux loisirs et au bénévolat. L’expérience montre en effet que les personnes qui font du bénévolat en tant que demandeurs d’asile ou qui entrent sur le marché du travail par les voies officielles sont plus promptes à s’assumer par la suite en tant que réfugiés reconnus.
Le nombre de places d’accueil diminue en outre si les demandes d’asile sont traitées plus rapidement. Il en va de l’intérêt du réfugié, qui souhaite avoir des certitudes le plus rapidement possible, et de la société. Aujourd’hui, la procédure dure généralement plusieurs mois, voire souvent plus d’un an. Il y a plusieurs raisons à cela, mais la plus grosse pierre d’achoppement est le manque de personnel lors des pics. Nous augmenterons les effectifs. Ce faisant, nous tiendrons également compte de leur charge de travail et du bien-être au travail.
Une deuxième façon de réduire le délai d’attente pour les demandes d’asile, et donc le besoin de places d’accueil, est de faire en sorte que le CGRA décide plus rapidement de l’octroi d’une protection subsidiaire. La protection subsidiaire est accordée aux personnes qui ne sont pas personnellement persécutées mais qui fuient une guerre, un conflit ou des menaces graves dans leur pays d’origine. Le CGRA a toutefois l’habitude de geler ses décisions dans l’espoir que la situation sécuritaire du pays va évoluer. Il l’a fait pour l'Afghanistan et pour Gaza fin 2023. Dans l’intervalle, toutes les demandes d’asile des réfugiés originaires de ces pays sont suspendues sans que la situation sur place ne s’améliore. Ces dernières années, d’importants groupes de Palestiniens et d’Afghans ont donc dû rester dans des centres d’asile pendant une longue période.
Toute personne qui arrive dans notre pays souhaite pouvoir voler de ses propres ailes le plus rapidement possible. Mais cela n’est pas toujours possible dans l’immédiat. Souvent, ces personnes sont encore très vulnérables en raison du long voyage qu’elles ont dû entreprendre afin de se mettre à l’abri. Elles ne parlent aucune des langues nationales ou sont encore incapables de travailler sur le plan psychologique. Il est donc important que les nouveaux arrivants reçoivent l’accompagnement dont ils ont besoin. Plus tôt les gens peuvent travailler, plus vite ils deviennent indépendants. Pour les aider dans leur parcours, il est important qu’ils puissent apprendre la langue le plus rapidement possible afin de faire leurs premiers pas vers l’intégration. Un kit d’intégration bien conçu est donc nécessaire.
Mais les moyens manquent. En 2021, le gouvernement flamand a décidé de réduire le budget de l’Agence de l’intégration et de l’intégration civique alors que la même coalition composée de la N-VA, de l’Open Vld et du cd&v avait déjà procédé à des coupes claires lors de la précédente législature. Pas moins de 3,5 millions d’euros ont été supprimés alors que les tâches de l’agence ont été élargies. Depuis 2022, les réfugiés et les nouveaux arrivants doivent payer 180 euros de frais d’inscription pour des cours de langues. C’est injuste et contre-productif. Les nouveaux arrivants ont déjà des difficultés financières et leur volonté d’intégration se heurte à des obstacles de plus en plus importants. La N-VA accuse les réfugiés de ne pas vouloir s’intégrer… tout en supprimant les moyens permettant cette intégration.
Nous garantirons pour tous les demandeurs d’asile un processus d’accueil et d’intégration qui comprendra des cours de langues, des informations sur leurs droits, une assistance dans les procédures administratives, une formation sur le fonctionnement politique de la Belgique et une orientation professionnelle. Actuellement, le cours dit d’intégration est avant tout destiné aux réfugiés reconnus et reste payant. Nous rendrons ce cours gratuit et le rouvrirons aux demandeurs d’asile afin de promouvoir une intégration dès le départ. Au lieu de couper le plus possible les demandeurs d’asile de la société, nous veillerons à ce qu’ils entrent en contact le plus rapidement possible avec leur nouvel environnement. Cette approche est bénéfique pour le bien-être, la sécurité et la compréhension mutuelle, même s’ils repartent quelques mois plus tard. C’est pourquoi nous supprimerons également le délai d’attente de quatre mois avant que les demandeurs d’asile ne puissent travailler.
La Convention de Genève relative au statut des réfugiés est le texte fondamental dont découle le droit d’asile. Ce droit est également inscrit dans la Déclaration universelle des droits de l’homme. Ces deux textes sont une réponse aux leçons tirées de la Seconde Guerre mondiale et de la victoire sur le nazisme. Des millions de personnes, dont de nombreux Belges, ont en effet dû fuir à l’étranger dans les années 1930 et 1940 afin d’échapper à la guerre et au fascisme.
La Convention de Genève garantit que les personnes fuyant des persécutions en raison de leur nationalité, de leur religion, du groupe social auquel elles appartiennent ou de leurs opinions politiques doivent être reconnues comme des réfugiés et bénéficier d’une protection. La Convention européenne des droits de l’homme de 1950 découle elle aussi de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Elle interdit la torture et les traitements inhumains ou dégradants, par exemple en cas d’expulsion, et consacre le droit à la vie familiale. Le principe de « non-refoulement » est un critère important pour déterminer qui peut être renvoyé ou non. Le renvoi d’une personne vers un régime où elle risque d’être persécutée est illégal selon ce principe.
Nous défendons cet héritage humain fondamental face aux politiques qui cherchent aujourd’hui à s’en prendre une nouvelle fois aux droits humains. N’importe qui – y compris en Belgique, l’histoire nous l’enseigne – peut un jour avoir besoin du droit d’asile pour échapper à la persécution.
Les réfugiés sont utilisés comme des épouvantails pour faire peur aux gens. C’est le « diviser pour mieux régner ». Les attaques contre le droit d’asile et la limitation des droits fondamentaux des réfugiés constituent un danger pour tous. S’attaquer aux droits humains de certains est souvent le prélude à une attaque contre les droits humains de tous. Pensons à la crise de l'accueil, qui a pris une ampleur sans précédent sous la politique du cd&v. Pour cela, le gouvernement a été condamné plus de 8 600 fois par le tribunal du travail, puis par le tribunal de première instance. Le juge s’est montré particulièrement sévère à l’égard des politiques du gouvernement : « Cette situation est inacceptable, car elle menace l’un des fondements de l’État de droit ». La violation des droits des personnes en fuite constitue en effet un dangereux précédent. En principe, l’État de droit doit nous protéger de l’arbitraire. S’il est remis en cause, nous sommes tous en danger.
Les partis de droite font croire que les demandeurs d’asile et les réfugiés reconnus reçoivent un soutien excessif, et demandent que ces droits soient restreints. Mais la vérité est tout autre. S’il ne peut pas encore gagner d’argent de manière indépendante, le demandeur d’asile a droit à une aide minimale. Il s’agit du gîte et du couvert et d’une modeste allocation d’adulte de 9,70 euros par semaine pour toutes les autres dépenses pendant la durée de la demande d’asile. Si sa demande est acceptée, le demandeur d’asile se voit accorder le statut de réfugié reconnu. Il doit alors quitter le centre d’accueil et a désormais les mêmes droits et obligations que tout citoyen. S’il ne trouve pas directement un emploi, il n’a pas droit, comme toute personne ayant travaillé trop peu de jours, aux allocations de chômage et ne peut s’adresser qu’au CPAS pour obtenir un revenu d’intégration. Nous nous opposons aux attaques contre ces droits fondamentaux minimaux.
Ces attaques ne proviennent pas uniquement de la droite et de l’extrême droite. Vooruit souhaite par exemple réduire les allocations aux réfugiés en dessous du revenu d’intégration. Une telle politique serait une régression et monterait les gens les uns contre les autres. Et une telle attaque contre les droits des réfugiés, qui ne peuvent pas se défendre, est généralement le prélude d’une remise en question de ces mêmes droits pour tout le monde. Lorsque le président de Vooruit de l’époque, Conner Rousseau, a présenté le plan de son parti visant à réduire les droits des réfugiés reconnus, il a également ciblé les malades de longue durée (« Ils doivent guérir et retourner au travail ») et les mères au foyer (car « elles utilisent aussi nos routes, non ? »). Cela démontre qu’une attaque contre les droits sociaux que nous avons acquis de haute lutte en Belgique ne vient jamais seule. Nous refusons d’entrer dans ce petit jeu. Nous défendons tous ceux qui appartiennent à la classe travailleuse.
L’hiver dernier, quelque 2 500 demandeurs d’asile ont dormi dans les rues de Bruxelles, selon les organisations humanitaires. Non parce qu’ils le voulaient, mais parce que le gouvernement en a décidé ainsi. La secrétaire d’État Nicole De Moor (cd&v) n’ayant pas pu fournir une capacité d’accueil suffisante, elle a décidé en août 2023 que les hommes célibataires n’auraient plus de place dans les centres d’accueil jusqu’à ce qu’un nombre suffisant de places soit trouvé. Une violation flagrante de la Convention de Genève qui a été vivement critiquée par la Ligue des droits humains, entre autres.
Chacun a le droit de vivre avec son partenaire, ses enfants, ses parents, etc., quelle que soit l’origine de ces personnes. Le droit à la vie familiale est pourtant de plus en plus attaqué. Les partis de droite, mais aussi Vooruit, appellent à un durcissement du regroupement familial. La Belgique a déjà été mise en cause à plusieurs reprises pour sa politique trop stricte. Chaque année, quelque 2000 à 3000 réfugiés arrivent ici dans le cadre du regroupement familial. Il ne s’agit donc que d’un petit groupe de personnes. Les seuils actuels obligent déjà les gens à vivre séparés beaucoup trop longtemps. Une situation totalement injuste qui a également des répercussions négatives sur leur intégration.
Les accords migratoires avec des pays comme la Turquie, la Tunisie et la Libye ne font certainement pas partie de la solution. Les réfugiés y sont entassés dans des camps surpeuplés et une grande partie des enfants ne vont pas à l’école. En Libye, les réfugiés sont contraints de travailler comme esclaves. La mise en œuvre de ces accords revient à organiser des refoulements, ce qui constitue une violation des droits humains. Souvenons-nous des expulsions vers le désert en Tunisie. Des centaines de personnes y ont perdu la vie. Nous n’oublierons jamais les images de Marie, six ans, et de sa maman. C’est pourquoi nous nous opposons à ces accords. De plus, l’Union européenne subventionne ainsi des gouvernements pas toujours très soucieux des droits humains et syndicaux, ce qui freine les luttes sociales et démocratiques.
Nous nous opposons au renforcement permanent et à la militarisation de l’agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes (Frontex). Les organisations de défense des droits humains dénoncent depuis des années l’opacité de Frontex, les bases de données qui y sont associées et les violations des droits humains. En 2022, le directeur de Frontex a dû démissionner à la suite d’un rapport accablant de l’Office européen de lutte antifraude (OLAF). Ce rapport a montré, entre autres, que Frontex avait pris part à des refoulements illégaux en Méditerranée et en mer Égée, qui ont ensuite été dissimulés.
Le PTB veut s'attaquer en premier lieu aux causes des migrations pour les réfugiés. Au niveau mondial, la guerre reste la principale cause de migration des populations. En Belgique aussi, la plupart des demandeurs d'asile sont des réfugiés de guerre : les trois principaux pays d'origine sont la Syrie, l'Afghanistan et la Palestine. Les guerres dans ces pays ont été au moins partiellement causées ou exacerbées par les actions de la Belgique et de l'Union européenne. Les réfugiés sont souvent le rétroviseur de notre politique étrangère. La Belgique et l'Europe, par exemple, continuent de fournir des armes à Israël qui mène contre Gaza un guerre qui, selon la Cour internationale de justice, présente « un risque réel de génocide ». Le flux actuel et futur de réfugiés de Gaza relève donc également de la responsabilité de nos gouvernements. Échanger ces interventions étrangères et ces politiques de guerre pour une politique active de paix et de solidarité internationale est donc le meilleur moyen de réduire le nombre de réfugiés dans le monde.
En même temps, nous défendons les droits humains des réfugiés tels qu'ils sont inscrits, entre autres, dans la Convention de Genève. Les personnes qui doivent fuir la guerre, la persécution ou la violence ont droit à une protection (asile) en vertu du droit international. Ce principe est très important pour le PTB, car l'histoire montre que tout le monde, y compris en Belgique, peut un jour avoir besoin du droit d'asile. Lorsque des personnes doivent fuir, elles ont le droit d'être accueillies correctement, dans le respect des droits humains. Personne ne devrait dormir dans la rue. Nous nous opposons à cette déshumanisation des demandeurs d'asile.
Avec le PTB, nous cherchons des solutions réalisables et humaines au défi des réfugiés. Nous combattons le racisme de l'extrême droite qui dépeint les réfugiés comme des profiteurs ou des criminels, alors que la grande majorité d'entre eux fuient la guerre, la persécution et la misère.
Aujourd'hui, de très nombreuses personnes dans le monde sont contraintes de migrer pour diverses raisons, telles que la guerre, l'oppression, la violence, la persécution, les catastrophes naturelles et la pauvreté. Nous voulons briser le grand tabou dans le débat actuel sur la migration : s'attaquer à ses causes. Si l'Europe continue à piller les ressources de l'Afrique, de nombreux jeunes Africains continueront à chercher un avenir en Europe. Si l'UE continue de soutenir la pêche industrielle à grande échelle le long de la côte ouest-africaine, sans laisser de poisson aux populations locales, les jeunes pêcheurs démunis de pays comme le Sénégal continueront d'être contraints de fuir vers l'Europe à la recherche d'un emploi. Ce n'est qu'en arrêtant le pillage de l'Afrique et en encourageant le développement du continent que les populations ne seront plus obligées de quitter leur foyer.
En ce qui concerne la migration de la main-d'œuvre, nous sommes préoccupés par les abus et le dumping social de certaines entreprises. Les pénuries sur le marché du travail sont principalement dues, d'une part, à la charge de travail élevée qui rend beaucoup de personnes malades pendant de longues périodes et, d'autre part, au fait que les salaires dans certaines professions essentielles sont beaucoup trop bas. La migration de la main-d'œuvre ne doit pas servir d'excuse pour ne pas s'attaquer à ces problèmes. Certains employeurs font venir des travailleurs étrangers bon marché pour combler les trous et les renvoient lorsqu'ils n'ont plus besoin d'eux. Comme s'ils n'étaient pas des personnes mais des outils que l'on consomme et que l'on jette ensuite. Nous ne sommes pas d'accord. Chaque travailleur doit être traité correctement. Et donc pas exploité à des salaires de misère, comme le font certains employeurs. Pour lutter contre le dumping social, nous demandons une égalité totale de rémunération pour un travail égal, y compris en termes de cotisations sociales.
Notre position est que nous devons présenter des solutions viables et humaines aux défis posés par la migration. Nous nous opposons au racisme de l'extrême droite qui dépeint les réfugiés et les migrants comme des profiteurs ou des criminels, alors que la grande majorité d'entre eux fuient la guerre, la persécution et la misère. Nous pensons que les politiques devraient viser à permettre aux gens de vivre, de travailler et de contribuer à la société en toute sécurité, ce qui, en fin de compte, profite à tout le monde.
La grande majorité des quelque 150 000 sans-papiers présents dans notre pays vivent et travaillent ici depuis des années. Souvent, ils sont venus ici légalement en tant que travailleurs migrants et sont restés après l'expiration de leur permis de travail temporaire. Dans différents secteurs, il est courant d'employer des travailleurs sans papiers au noir, souvent à des salaires très bas et sans aucune protection sociale. Il s'agit, par exemple, des travailleurs de la construction, mais aussi des livreurs de repas et de colis, des plongeurs dans les restaurants, des femmes de chambre dans les hôtels, du personnel de nettoyage dans les entreprises, des gardes d'enfants... Il n'est pas exagéré de dire que les sans-papiers sont en partie responsables du bon fonctionnement de notre économie. Mais la façon dont ils sont exploités dans l'économie au noir et la façon dont ils sont traités par le gouvernement sont intolérables. Par exemple, ils paient la TVA à l'État sur toute leur consommation, mais n'ont aucun droit et ne reçoivent aucune aide ou protection de la part du gouvernement.
Nous préconisons la régularisation sur une base individuelle, utilisant des critères objectifs tels que le fait d'avoir du travail et évalués par une commission indépendante. Si les sans-papiers ne doivent plus travailler au noir, ils pourront bénéficier des mêmes salaires et des mêmes conditions de travail que les autres. Cela permettra de mettre fin à l'exploitation et au dumping social. En outre, cela garantira qu'ils paient l'impôt sur le revenu et contribuent à la sécurité sociale et aux pensions, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.
Notre proposition est non seulement plus juste et plus humaine, mais aussi plus réaliste. La politique d'expulsion actuelle est très coûteuse et cause plus de problèmes qu'elle n'en résout. Les centres fermés coûtent à eux seuls 70 millions d'euros par an. Plus on intensifie la chasse aux sans-papiers, plus on les pousse vers la clandestinité et le monde souterrain. Ils deviennent alors des proies faciles pour la mafia de la drogue, par exemple.