Augmentation des salaires
Nous le ressentons tous et toutes à la caisse du supermarché ou lorsque nous payons nos factures : notre pouvoir d'achat n'est plus ce qu'il était. Au cours des dernières années, l'inflation – ou : l'augmentation du coût de la vie – a augmenté rapidement. Plus rapidement que nos salaires. Les revenus réels des gens ont donc diminué. Nous voulons arrêter cette tendance et permettre les augmentations de salaire.
- Nous augmentons les salaires en rétablissant le droit à la libre négociation des augmentations collectives de salaire.
- Nous retirons au gouvernement la possibilité d'interdire des augmentations de salaire. Pour cela, la loi sur le blocage des salaires est révisée.
- Nous augmentons également le salaire minimum à 17 euros par heure, comme le proposent les syndicats et les organisations féministes.
Pourquoi des augmentations de salaire sont-elles nécessaires ?
Nous avons perdu du pouvoir d'achat sous le gouvernement Vivaldi. Un sondage récent indique que le pouvoir d'achat est également la principale préoccupation des Belges.[1] La Grande Enquête du PTB, réalisée auprès de plus de 100 000 personnes, le confirme également. Beaucoup de gens ont du mal à joindre les deux bouts, même lorsqu'ils travaillent. Ce sentiment est compréhensible avec les fortes hausse de prix que nous avons connues ces dernières années.[2] L'augmentation du coût de la vie réduit la valeur réelle des salaires : avec le même salaire, on peut acheter moins. Le mécanisme de l'indexation automatique des salaires corrige cela partiellement et aide ainsi à compenser la perte. Mais il est menacé. Les grandes fédérations patronales veulent abolir ce mécanisme.[3] Certains partis envisagent une « modification », une « adaptation » ou une « modernisation » de celui-ci. Ce sont différentes manières de dire la même chose : s’attaquer et affaiblir le mécanisme.
Le gouvernement de la Vivaldi a empêché l’indexation légitime avec pour conséquence que le salaire réel des travailleuses et travailleurs belges a subi une perte cumulée de 2,52 % durant les trois dernières années . Cela veut dire que si le salaire avait suivi précisément l’évolution du coût de la vie, chaque travailleur et chaque travailleuse du pays auraient touché 2,52 % [4] de salaire en plus. Pour un salaire moyen, cela veut dire une perte cumulée de 3 472 euros sous la Vivaldi.[5]
Cette perte de salaire réel s’explique par trois éléments :
Premièrement, le gouvernement Vivaldi a utilisé la loi sur le blocage des salaires pour bloquer les augmentations de salaire au-dessus de l’index à un maximum de 0,4 % pour la période 2021-2022[6] et à un maximum de... 0,0 % pour la période 2023-2024.[7]
Deuxièmement, certains produits tels que le carburant ne sont pas inclus dans la liste des produits sur laquelle l'index est calculé. En d'autres termes, l'index ne reflète pas correctement le coût de la vie.
Troisièmement, entre le moment où les prix augmentent et le moment où l'ajustement de l'indice intervient, le salaire réel subit une perte. Cela peut s'accumuler sur plusieurs mois, voire jusqu'à une année complète pour les salaires indexés une fois par an.
Les primes et chèques ne compensent pas la perte de salaire réel
Le gouvernement explique qu’il a étendu le tarif social et qu’il a accordé des chèques énergie pour compenser la hausse de la facture. Il explique aussi qu’il a permis aux syndicats de négocier des primes (primes corona et primes pouvoir d’achat) dans les entreprises.
Tout d’abord, le tarif social. Il a surtout concerné les ménages avec des très petits revenus, en particulier les allocataires sociaux. Très peu les travailleurs et travailleuses salariés « normaux ».
Des chèques énergies de maximum 980 euros concernaient les gens qui ont signé un contrat de gaz et/ou électricité après le 30 septembre 2022 et qui gagnent moins de 65 000 euros par an. Ces chèques ne concernent donc pas tout le monde et ne compensent que partiellement la perte de pouvoir d’achat liée à la baisse du salaire réel. Au mieux, la perte de pouvoir d’achat est de 2 500 euros.
Pour ce qui concerne les primes « corona » (2021-2022) et primes dites « pouvoir d’achat » (2023-2024), le gouvernement en avait fait beaucoup de publicité. Nous allions toucher jusqu’à 500 euros pour la première et jusqu’à 700 euros pour la deuxième. La réalité fut tout autre. Ces primes ont été limitées et concernaient au mieux la moitié des salariés. Elles étaient données sous forme de chèques à faire valoir dans certains magasins. Pour les primes « corona », on sait que moins de la moitié des salariés l’ont touchée et qu’elle était de 274 euros en moyenne (pour deux ans, ce qui fait moins de 12 euros par mois) ; Pour la période 2023-2024, on ne dispose pas des chiffres définitifs mais les premières indications semblent montrer que seul 25 % des salariés l’ont touchée avec un montant moyen de 375 euros (là aussi pour deux ans).[8] En plus, ces primes ne financent en rien la sécurité sociale et ne comptent donc pas pour la construction de sa pension.
Il y a des moyens disponibles pour augmenter les salaires
Chaque année, nous produisons collectivement des richesses. La part de ces richesses qui va aux salaires n’a cessé de diminuer ces dix dernières années à l’avantage des profits des (grandes) entreprises. Dit autrement, nous produisons chaque année un gâteau. Une fois produit, ce gâteau se divise en un gros morceau « salaires » et un gros morceau « profits ». Ces dix dernières années, la part du gâteau qui va aux salaires ne cesse de diminuer et la part du gâteau qui va aux profits ne cesse de grandir. Ce processus s’est produit sous le gouvernement Michel mais il a continué sous le gouvernement De Croo. Il est le résultat de politiques de blocage salarial menées sous les deux gouvernements. Concrètement, trois pourcents des richesses produites ne vont plus aux salaires, c’est l'équivalent de plus de 16 milliards d’euros en moins. Cela montre qu'avec un gâteau mieux partagé et une répartition plus équitable de la richesse produite, il existe suffisamment de moyens pour augmenter nos salaires.
La Banque nationale de Belgique (BNB) explique ainsi dans une étude très récente : « La part (brute) des bénéfices des sociétés non financières belges s'est située autour de 36 % dans la période de 1995 à 2000, mais a connu une tendance à la hausse depuis, avec une interruption notable pendant et à la suite de la crise financière mondiale de 2007-2008. Cependant, elle a de nouveau augmenté, passant de moins de 39 % en 2013 à environ 44 % en 2021, avant de reculer quelque peu en 2022 face à une forte augmentation des coûts des intrants. En termes trimestriels, la part brute des bénéfices a reculé à 40,9 % au premier trimestre de 2023. Malgré cette récente baisse, elle reste relativement élevée dans une perspective historique ».[9]
Mais d’où vient cette augmentation de la marge bénéficiaire des entreprises ? La BNB répond à la question : « les coûts salariaux ont nettement moins progressé que la productivité du travail, ce qui coïncide avec le recul de la part des salaires dans le revenu national ». Et « cette situation résulte des diverses mesures visant à améliorer la compétitivité-coûts des entreprises belges, à la fois par le biais des normes salariales (qui limitent la progression des salaires réels) mais aussi par des mesures ad hoc mises en place après 2014, telles que la suspension temporaire des mécanismes d’indexation et les réductions des cotisations de sécurité sociale payées par l’employeur ».
Cela montre qu’en rééquilibrant le gâteau, en ayant un partage plus juste des richesses produites, il existe des moyens disponibles pour augmenter nos salaires.
Pour augmenter nos salaires, revoyons la loi de blocage salarial
Pour inverser le processus de baisse de la part salariale, il faut d’abord protéger l’index contre toute tentative de le détricoter. C’est la base. Mais ce n’est pas suffisant. Il faut aussi que les salaires puissent augmenter à nouveau au-delà de l’indexation automatique. On peut le faire en révisant la loi de blocage salarial. Les organisations syndicales doivent pouvoir à nouveau négocier librement des augmentations collectives de salaires. La loi actuelle est unique au monde. Nulle part ailleurs en Europe, un gouvernement n’a – comme en Belgique – le droit d’interdire les augmentations collectives de salaire. Cette loi traduit bien les priorités du gouvernement belge qui est capable de bloquer les augmentations de salaire mais incapable de bloquer les dividendes versés aux actionnaires ou de bloquer les prix de l’énergie.
À côté de cela, le salaire minimum doit augmenter à 17 euros / heure ou 2 800 euros bruts / mois pour un temps plein.
Loi de 1996, réforme de 2017 et proposition de loi Goblet-Hedebouw
En 1996, un gouvernement chrétien-socialiste a adopté ce qu’on appelle aujourd’hui la loi de 1996 sur les salaires. Cette loi visait à ce que les salaires belges ne puissent pas augmenter plus vite que les salaires des pays voisins. Sur base d’une prévision des augmentations de salaire dans les pays voisins, patrons et syndicats devaient s’entendre sur une augmentation maximale des salaires. S’ils ne parvenaient pas à un accord, le gouvernement avait le pouvoir d’imposer lui-même une norme d’augmentation maximale des salaires (comme l’a fait le gouvernement Di Rupo en 2013-2014), et des sanctions en cas de non-respect de la norme.
En 2017, avec le soutien du Vlaams Belang, la loi de 1996 est rendue plus restrictive par le gouvernement Michel : on trafique la manière dont on fait la comparaison entre l’évolution des salaires belges et des salaires des pays voisins, on renforce les sanctions là où le maximum d'augmentation salariale serait dépassé, etc.
Pour retrouver un véritable espace pour négocier des augmentations collectives de travail, il ne faut pas revenir à la version de 1996 de la loi sur les salaires. Nous souhaitons profondément la réformer pour que la norme soit indicative et que la comparaison des salaires belges avec ceux des pays voisins ne soit pas faussée. C’est ce que fait la proposition de loi introduite par feu Marc Goblet (ancien secrétaire général de la FGTB) et Raoul Hedebouw (président du PTB).
La lutte contre le gouvernement Vivaldi pour des augmentations de salaire
La famille libérale et le cd&v sont de chauds partisans de la politique de blocage salariale. Pour les autres partis de la Vivaldi, il devrait soi-disant en être autrement. Du moins… avant les élections et à l’occasion des discours du 1er mai. Mais en pratique, les autres familles politiques ont suivi les libéraux et le cd&v.
Le PS et Vooruit [10] (Sp.a à l’époque) avaient fait de la réforme de la loi de 1996 (durcie en 2017 par le gouvernement Michel avec le soutien du Vlaams Belang) une ligne rouge de leur programme des élections de 2019. Cette ligne rouge a été complètement abandonnée dans les négociations gouvernementales de la Vivaldi. La Vivaldi a entériné la loi de 1996 durcie en 2017. Le ministre Dermagne a signé un arrêté royal qui permet des augmentations salariales supérieures à l’index de maximum 0,4 % pour la période 2021-2022 et de maximum 0 % pour la période 2023-2024. Il en va de même pour la famille écologiste (Ecolo et Groen) qui avaient pourtant tous deux dans leur programme la réforme de la loi de blocage salarial.
En résumé : Vooruit, PS, Groen et Ecolo avaient promis avant les élections de 2019 de revoir la réforme de la loi de 1996... mais n'ont rien fait. Ce sont les libéraux, pourtant minoritaires dans le gouvernement, qui ont finalement imposé leurs vues.
Plus encore, pendant la législature, le président de Vooruit expliquait à la veille du 1er mai 2021 : « Je ne peux pas expliquer à la caissière d’un supermarché bénéficiaire que les actionnaires y reçoivent des dividendes mais qu'il n'y a pas de prime salariale pour elle. C’est injuste. J'espère qu'un accord pourra encore être trouvé. Mais que le signal soit clair : s'il n'y a pas de supplément de salaire pour ces personnes, nous dirons qu’aucun dividende ne pourra être versé. »[11]
Au même moment, Paul Magnette menaçait de ne pas signer l’arrêté royal de blocage salarial si les patrons n'arrivaient pas à se mettre d’accord avec les organisations syndicales.
Une fois la fièvre du 1er mai passée, toutes ces promesses et menaces ont vite été oubliées et le ministre de l’Emploi Pierre-Yves Dermagne (PS) a signé l’arrêté royal de blocage salarial (0,4 % d’augmentation maximale pour la période 2021-2022). Il a aussi signé l’année suivante l’arrêté royal de 0,0 % d’augmentation de salaire pour la période 2023-2024.
Pour masquer son échec en matière de salaires, la famille socialiste fait comme si c’était elle qui avait sauvé l’index et que c’était grâce à elle qu’il existe aujourd’hui une indexation des salaires. Or ce n’est pas du tout le cas. Les premiers mécanismes d’indexation automatique des salaires ont été introduits en 1920… pas sous la Vivaldi. Il s’agit d’une conquête du mouvement social,inscrite dans des conventions collectives. Et, aujourd’hui encore, si le gouvernement n’a pas osé toucher à l’indexation automatique des salaires, c’est avant-tout dû à la très forte mobilisation syndicale et politique pour les salaires de ces dernières années.
Pendant deux ans, de début 2021 à fin 2022, les organisations syndicales ont mené un combat constant pour défendre le droit de négocier des vraies augmentations de salaire et pour réformer la loi de 1996 sur les salaires. Avec de nombreuses grèves, journée d’actions et manifestations nationales d’ampleur, avec une pétition citoyenne ayant récolté près de 100 000 signatures sur le site du Parlement, avec des campagnes larges de sensibilisation dans les entreprises, dans les communes ou sur les réseaux sociaux...
Le PTB a participé à soutenir ce mouvement lors des mobilisations et à travers une large campagne de sensibilisation. Mais aussi grâce à un travail parlementaire intense. C’est ainsi que Raoul Hedebouw, président du PTB a introduit une proposition de loi avec le député PS et ancien secrétaire général de la FGTB, feu Marc Goblet. Elle vise à libérer la négociation salariale des entraves gouvernementales. Avec cette proposition de loi, on enlève la possibilité donnée au gouvernement d’interdire des augmentations de salaire. On rend les pleines possibilités aux syndicats de faire une des tâches essentielles de leur métier : négocier des augmentations de salaire.
Les contre-arguments ?
Les augmentations de salaire menacent-elles la compétitivité ?
Notre compétitivité est menacée par l’indexation automatique des salaires et encore plus si nos salaires augmentent, répète régulièrement la FEB (la Fédération des entreprises de Belgique, autrement dit la fédération du grand patronat). Pourtant, les entreprises belges n’ont jamais fait autant de profits. Souvent beaucoup plus que celles des pays voisins.
La Banque nationale explique que, contrairement aux pays voisins, les salaires belges ont évolué beaucoup moins vite que la productivité. Avec pour conséquence, que les profits évoluent donc plus vite en Belgique que dans les pays voisins.[12] La Banque nationale précise aussi : « Les coûts salariaux belges par unité produite sont désormais proches de ceux des Pays-Bas, mais bien inférieurs à ceux de la France et de l’Allemagne ».
Ensuite, ce que ne dit pas la FEB, c’est que notre mécanisme d’indexation automatique des salaires a joué un rôle très positif dans l’économie. Il a permis que la Belgique connaisse une des croissances les plus élevées d’Europe. Augmenter les salaires cela stimule la consommation et c’est donc bon pour l’économie.
Le salaire réel n’a-t-il pas augmenté, comme le prétend le gouvernement ?
Le gouvernement Vivaldi met aussi en avant le fait que les salaires réels ont progressé de 2,9 % entre le 1er trimestre 2022 et le 1er trimestre 2023 (chiffre OCDE).[13] Ce que le gouvernement Vivaldi ne dit pas, c’est que cette augmentation ne permet pas de revenir au salaire réel de 2020 et ne permet pas de rattraper ce qui a été perdu pendant la période De Croo – Dermagne. Elle ne dit pas non plus que le salaire réel est reparti à la baisse au troisième trimestre de 2023.
Sommes-nous menacés par une boucle salaires-inflation ?
Aucune étude jusqu’ici ne montre ce phénomène. Les inflations récentes n’avaient rien avoir avec les augmentations de salaire mais bien avec l’explosion des prix de l’énergie et la spéculation sur les autres matières premières. Certaines entreprises ont aussi profité de leur position de monopole pour tirer leurs prix vers le haut. Ce sont ces différents éléments qui ont contribué à faire grimper l’inflation.
Si on touche à la loi de 1996, la droite et la FEB réclament qu’on touche à l’index
Les partis de droite et encore plus le patronat ou la Commission européenne montent en permanence au créneau pour mettre un terme à tous les mécanismes « automatiques » comme l’indexation ou les barèmes mais aussi pour immobiliser les mécanismes de négociation collective interprofessionnelle des salaires. Ils sont bien conscients que c’est dans la collectivité que réside la force de la classe travailleuse. Et dans la concurrence que réside sa faiblesse. Ce n’est pas une surprise.
Comme parti de gauche, nous renforcerons le mouvement syndical qui réclame le maintien des mécanismes d’indexation qui existaient bien avant la loi de 1996 et qui réclament le retour d’une négociation libre des salaires.
« Frank Vandenbroucke a augmenté tous les revenus par l'index »[14]
« Frank Vandenbroucke a augmenté les revenus de tout le monde via l’index » déclarait récemment Melissa Depraetere, députée Vooruit. La famille socialiste fait comme si ce qui existe depuis plus de 100 ans grâce à la lutte du mouvement social était l’oeuvre de quelques ministres au sein du gouvernement actuel. Ce n’est bien entendu pas le cas. Au contraire, au moment des fortes inflation, Vooruit (parti socialiste du nord du pays) est venu avec une proposition de modification de l’index en proposant d’introduire un « index d’urgence sociale ». Avec ce système, les soi-disant « hauts salaires » seraient moins indexés que les bas. Plutôt que d’avoir un système simple et unique qui rassemble toute la classe travailleuse, on aurait un système d’indexation à deux vitesses.[15] Ce n’est pourtant pas en baissant le pouvoir d’achat des hauts salaires qu’il faut augmenter celui des bas salaires. Cette logique divise et affaiblit le monde du travail. C’est dans les montagnes de profits qu’il faudrait aller chercher les moyens d’augmenter tous les salaires.
En cassant la loi de 1996, vous allez casser la concertation sociale
Nous ne sommes pas pour la suppression de la loi salariale. Nous sommes pour réformer la loi de 1996 grâce à la proposition de loi Goblet-Hedebouw. Nous voulons renforcer le cadre de la négociation salariale interprofessionnelle en la libérant du blocage salarial actuel. Notre proposition de loi protège l’index et retire au gouvernement le droit d’interdire les augmentations de salaire.
Doit-on augmenter seulement le salaire net et pas le salaire brut ?
La plupart des partis sont en campagne et annoncent partout des promesses d’augmentation du salaire… net. 300 euros pour les uns, 400 euros pour les autres. Certains économistes de droite défendent l’indexation du salaire net au détriment de celle du brut.[16] Pour tous ces partis et économistes, notre salaire brut serait suffisant, il ne faudrait pas l’augmenter mais seulement augmenter le salaire net ou le salaire « poche », comme ils disent. Pourtant, rien n’est moins vrai. Les mêmes gens qui disent que notre salaire brut est suffisant ou même trop élevé sont les mêmes qui affirment que les caisses des pensions sont vides et qu’on doit travailler plus longtemps. Ces caisses qu’on alimente avec notre salaire… brut.
Petit rappel : notre salaire est composé de ce qu’on touche sur notre compte, c’est le salaire net. Mais notre salaire ne s’arrête pas là. Il est aussi composé de nos impôts et des cotisations que nous versons à la sécurité sociale. Ces impôts et ces cotisations sociales sont ce qu’on appelle le salaire différé ou le salaire socialisé. C’est la partie du salaire qui est mise en commun pour rendre une série de services : les pensions, l’assurance maladie, l’assurance accident de travail, les allocations familiales, l’assurance chômage, l’enseignement de nos enfants, nos hôpitaux...
Quand on augmente le salaire brut, cela permet d'augmenter directement notre pécule de vacances et notre prime de fin d’année mais cela permet donc aussi de mettre de l’argent dans les caisses de ce salaire différé : on construit une meilleure pension, on se garantit une meilleure indemnité de maladie ou de chômage, et plus encore, on contribue à financer toute la sécurité sociale. C’est uniquement parce que les partis traditionnels ont baissé notre salaire socialisé, qu’aujourd’hui il manque de l’argent pour payer nos pensions et qu’on nous dit qu’il faut travailler plus longtemps. Récupérer notre salaire brut perdu, ce sera bon pour notre net mais ce sera aussi la condition pour refinancer les caisses de notre sécurité sociale.
Notes de bas de page
Voir plus loin
FEB, Mémorandum électoral de la FEB : 10 priorités « pour une Belgique plus forte », 4 décembre 2023, https://www.vbo-feb.be/fr/publications/memorandum-electoral-de-la-feb-10-priorites-pour-une-belgique-plus-forte/
Il s’agit de la période comprise entre le 1er janvier 2021 et le 31 décembre 2023. Étude du Service d’études du PTB du 29 novembre 2023 mise-à-jour en février 2024 avec les chiffres du dernier trimestre de 2023.
C’est une perte cumulée plus importante du salaire réel que sous la Suédoise où la perte cumulée avait été de 1,55%.
Arrêté Royal 30/07/2021
Arrêté Royal 13/05/2023
https://www.nbb.be/fr/articles/evolution-des-marges-beneficiaires-des-entreprises-et-inflation
Résolution 132 (programme sp.a) - De la norme contraignante, nous rétablissons une norme indicative sur laquelle les secteurs, compte tenu de leurs différences de productivité, peuvent s'orienter. Nous rétablissons ainsi la liberté (et la possibilité) de négociation entre les partenaires sociaux.
La Banque Nationale de Belgique explique ainsi : «Une comparaison internationale montre que les marges bénéficiaires en Belgique sont également largement déconnectées de l'évolution dans les trois principaux pays voisins. (Le) facteur (le) plus important (pour expliquer cette différence est que) la croissance des coûts salariaux dans ces pays s'est moins écartée de la croissance de la productivité qu'en Belgique.» https://www.nbb.be/fr/articles/evolution-des-marges-beneficiaires-des-entreprises-et-inflation
Humo, interview Conner Rousseau, 26 avril 2022