Pourquoi le PTB est depuis plus de 20 ans contre Poutine
Depuis que Vladimir Poutine est devenu président de la Russie, il y a plus de vingt ans, le PTB y est opposé, ainsi qu’à son régime.
Alors que plusieurs partis traditionnels en Europe faisaient des affaires avec Poutine, des partis de gauche authentique comme le PTB dénonçaient sa politique antisociale et sa guerre dégoûtante en Tchétchénie.
Poutine est un oligarque capitaliste, anticommuniste, va-t-en-guerre et nationaliste grand-russe. Sous sa présidence, les inégalités ont augmenté très fortement en Russie. Ce sont les oligarques qui mènent la danse et la classe travailleuse qui en fait les frais.
Le PTB a condamné la guerre de la Russie en Ukraine dès le départ, de façon inconditionnelle et sans ambiguïté. Voilà les faits.
Poutine président avec le soutien de Tony Blair et co.
Le PTB est opposé à Poutine et l'a toujours été, dès le début. On ne peut pas en dire autant de certaines forces politiques européennes traditionnelles, qui, initialement, ont trouvé en cet oligarque russe un partenaire bienvenu pour mener à bien un commerce lucratif de pétrole, de gaz et d'autres matières premières précieuses.
Fin 1999, avant même que Poutine ne soit élu, le Premier ministre britannique social-démocrate Tony Blair se rend à Moscou avec son épouse Cherie. Accompagnée de Lyudmila, la femme de Poutine, ils visitent le palais d'été des tsars, aux confins de Saint-Pétersbourg et le magnifique musée de l'Ermitage. Les couples passent ensemble une soirée à l'opéra dans le luxueux théâtre Mariinsky. Poutine remporte les élections, soutenu par l'establishment russe. Il n'a pas encore prêté serment qu'il est déjà invité à Londres. Alors que le Conseil de l'Europe envisage de suspendre la Russie en raison de la guerre sanglante qui fait rage en Tchétchénie, Tony Blair fait en sorte que Poutine soit convié à prendre le thé avec la reine d'Angleterre dans le prestigieux palais de Buckingham. Le Premier ministre italien, Silvio Berlusconi, noue également des liens d'amitié durables avec Poutine.
On observe aujourd'hui, aux quatre coins du monde, un même mécanisme : ceux qui plaident systématiquement pour un cessez-le-feu immédiat et une désescalade sont taxés de sympathies pro-russes. Comme le dit Jeremy Corbyn, figure de proue de la gauche du parti Labour, en Angleterre : « On m'accuse d'être pro-russe et pro-Poutine. Je suis pro-droits humains, c'est ma position. Poutine a été élu président avec le soutien de Tony Blair et de quelques autres dirigeants occidentaux. Le monde occidental lui a ouvert grand les bras lors d'une visite d'État en Grande-Bretagne. À cette époque, la Tchétchénie était en proie à une guerre effroyable, qui a coûté de nombreuses vies, tant tchétchènes que russes. Les droits humains de la population tchétchène ont été bafoués. Le racisme envers les Tchétchènes était palpable à Moscou et dans d'autres villes. J'ai moi-même fait partie d'une délégation qui s'est rendue à Moscou avec le groupe parlementaire consacré aux droits humains ».
Capitalisme sauvage en Russie
Aujourd'hui, certains soutiennent que la Russie est toujours « communiste ». Une théorie fausse. L’Union soviétique s'est désintégrée il y a plus de 30 ans. Depuis 1991, la Russie baigne dans une anarchie capitaliste extrême. Ce n’est pas un secret que ce système a permis à une petite couche d'« oligarques » capitalistes de s'enrichir rapidement grâce aux pratiques mafieuses et aux privatisations forcées opérées par Boris Eltsine, grand ami de Washington. Résultat : une explosion des inégalités en Russie et un effondrement de l'économie.
Lorsqu'il devient président en 2000, Vladimir Poutine affirme vouloir remettre la Russie « sur la carte ». Comment ? En offrant aux capitalistes et oligarques russes de nouvelles perspectives après l'effondrement économique, notamment en exportant des matières premières comme le fer, le nickel, l'aluminium ou les diamants. Sans oublier, bien sûr, le pétrole et le gaz. Les prix élevés des matières premières aident les oligarques à ranimer quelque peu une économie en berne.
La classe travailleuse russe, quant à elle, passe à la caisse. Le fossé entre riches et pauvres est plus profond que jamais. Dans la Russie capitaliste dirigée par Poutine, les inégalités de revenus ont atteint un niveau pire encore que dans les États-Unis capitalistes. Et ce n’est pas peu dire. En Russie, le 1 % le plus riche de la population détient 48 % de l'ensemble de la propriété privée. Les 10 % les plus riches s'en approprient les trois quarts. La moitié la plus pauvre des Russes possède ensemble à peine 3 % des biens du pays.
Près de la moitié de la population a juste de quoi se nourrir et s'habiller, mais pas d’acheter des biens de consommation durables. Plus d'un tiers des ménages n'ont pas les moyens d'acheter deux paires de chaussures confortables et adaptées à la saison pour chaque membre de la famille. Plus de la moitié ne peuvent faire face à des dépenses imprévues.
Le fossé entre les revenus du travail et ceux du capital est abyssal. Le professeur américain Daniel Treismann a démontré que, sous Poutine, ce n'est plus seulement le secteur pétrolier et gazier qui gonfle les comptes en banque des riches, mais aussi le commerce de l'immobilier, des produits chimiques et des télécommunications. Des économistes tels que Filip Novokmet, Thomas Piketty et Gabriel Zucman découvrent en 2017 que les oligarques ont parqué l'équivalent de 85 % du produit intérieur brut de la Russie sur des comptes à l'étranger, souvent dans des paradis fiscaux. Il s'agit là ni plus ni moins d'un véritable vol des richesses nationales, produites par la classe travailleuse.
En bref, les rapports de propriété en Russie sont profondément capitalistes et étroitement tenus par l'appareil d'État russe de Poutine et de son entourage. Cet appareil d'État repose sur deux piliers : le renforcement de l'ordre public (répression) d'une part, et un clientélisme inouï d'autre part. Vladimir Poutine récompense les grands hommes d'affaires russes loyaux envers lui en soutenant activement leurs activités commerciales. Les oligarques proches de lui parviennent ainsi à obtenir des contrats lucratifs pour de grands marchés publics. La marque de fabrique de ce modèle est l’imbrication entre extrême richesse et pouvoir politique. Le système judiciaire russe aide l'élite à préserver sa position et ses privilèges.
Condamnation inconditionnelle et sans équivoque de Poutine
Poutine n'apporte rien de bon. Ni dans son pays, ni à l'étranger. C'est notre position depuis 20 ans. Au niveau international, Poutine se comporte en impérialiste, déterminé avant tout à prendre le contrôle sur le voisinage immédiat de la Russie. On se souvient de la guerre sale et extrêmement violente en Tchétchénie. Aujourd'hui, il envahit militairement l'Ukraine.
Le PTB a condamné d'emblée, de manière inconditionnelle et sans ambiguïtél'invasion criminelle de l'Ukraine. Le 22 février, soit deux jours avant l'invasion, Poutine a reconnu l'indépendance autoproclamée de la région ukrainienne autour de Donetsk et Lugansk. Le PTB a alors fermement condamné cette violation de l'intégrité territoriale de l'Ukraine.
Le matin de l'invasion criminelle du 24 février, le président du PTB, Raoul Hedebouw, s'est immédiatement exprimé sur Twitter en ces termes : « le PTB condamne l'intervention militaire russe en Ukraine : une violation flagrante de la souveraineté ukrainienne et de la Charte des Nations unies ». L’après-midi même, Nabil Boukili au Parlement fédéral et Kim De Witte au Parlement flamand condamnaient eux aussi cette attaque criminelle. Quiconque a vu ou entendu leurs interventions le sait.
Au Parlement fédéral, le député PTB Nabil Boukili a ainsi déclaré, le 24 février : « Monsieur le Premier ministre, Madame la ministre, chers collègues, depuis cette nuit, la guerre a éclaté dans le continent européen suite à l'attaque de la Russie contre l'Ukraine. Tout d'abord, j'aimerais, au nom de mon groupe, condamner l'intervention militaire russe dans le territoire ukrainien. Que ce soit la reconnaissance de l'indépendance des deux républiques ou l'intervention militaire : ces deux actions sont en contradiction avec le droit international et violent la Charte des Nations unies. La souveraineté des peuples ne doit en aucun cas être remise en question, et la souveraineté de l'Ukraine et le respect de ses frontières ne doivent pas faire exception.
Nous condamnons cette intervention aussi parce que cela nous mène vers une guerre dont les conséquences pourraient être catastrophiques, pour les peuples ukrainien et russe, mais aussi pour l'ensemble des peuples européens et que rien de bon ne sortira de cette confrontation militaire. La guerre, ce n'est pas seulement une partie d'échecs entre puissances pour des zones d'influence. La guerre, c'est des bombes qui tombent sur les populations, sur des écoles, des hôpitaux et toutes sortes d'infrastructures qui sont détruites. C'est des familles déchirées. C'est des hommes et des femmes, des enfants et des vieillards qui paient de leur vie le prix de cette escalade guerrière, commanditée par des dirigeants qui, eux, sont à l'abri. C'est des centaines de milliers de réfugiés, qui sont déracinés et conduits vers un avenir incertain. »
Le même jour, au Parlement flamand, Kim De Witte, député du PTB, a tenu exactement les mêmes propos : « Chers collègues, mon groupe condamne également l'attaque russe en Ukraine. Tant la reconnaissance unilatérale de l'indépendance de Donetsk et de Lougansk que l'invasion militaire constituent des violations incontestables de la souveraineté ukrainienne, de la Charte des Nations unies et du droit international. L'intégrité territoriale et la souveraineté d'un peuple ne peuvent jamais être remises en question. L'Ukraine ne fait pas exception. Chers collègues, nous condamnons également le nationalisme russe et le chauvinisme de Poutine. Ces attitudes ne correspondent en rien à notre manière de voir les choses et ne feront qu'alimenter le nationalisme ukrainien. De plus, elles risquent d'enflammer davantage encore toute la région. Enfin, nous condamnons cette attaque car elle mène à la guerre. Une guerre dont, nous l'avons souligné, les conséquences seront catastrophiques tant pour les populations ukrainiennes que russes, mais aussi, par extension, pour tous les peuples européens. Cet affrontement militaire n'apportera rien de bon. La guerre, ce sont des bombes qui tombent sur les populations, sur des écoles, sur des hôpitaux, sur toutes sortes d'infrastructures. Ce sont des familles déchirées, des hommes, des femmes, des enfants et des vieillards qui paient de leur vie une escalade guerrière encouragée par leurs dirigeants. Ce sont des centaines de milliers de personnes qui doivent fuir et faire face à un avenir incertain. En bref, nous condamnons fermement les paroles, les actes et les faux prétextes de Poutine ».
Le 1er mars, au Parlement européen, le PTB a demandé un vote séparé sur les trois premiers articles afin de condamner inconditionnellement et fermement la guerre criminelle de la Russie contre l'Ukraine. Le PTB a voté pour ces trois articles qui condamnent sans ambiguïté aucune la guerre de Poutine.
Rouleau compresseur idéologique contre le PTB
La condamnation énergique du PTB de cette guerre criminelle contre l'Ukraine ne souffre aucune interprétation. « Poutine est un oligarque capitaliste, anticommuniste et va-t-en-guerre qui, par cette invasion illégale de l'Ukraine, viole toutes les conventions des Nations unies. Dans son chauvinisme grand-russe, Poutine remet même en question l'existence de l'Ukraine. C'est de la folie. Et c'est précisément la raison pour laquelle il s'en prend à Lénine dans son discours, car en 1922, Lénine a défendu l'unité et l'autonomie de l'Ukraine », écrit le secrétaire général du PTB Peter Mertens le 25 février.
Tous ces éléments sont des faits. « Lors de toute guerre, celui qui se veut prudent, écoute les arguments des deux camps en présence avant de se forger un avis ou met en doute les informations officielles, est immédiatement considéré comme complice de l'ennemi », écrit l'historienne Anne Morelli. Dans son livre révolutionnaire intitulé « Principes élémentaires de la propagande de guerre », elle met en lumière la manière dont les esprits sont passés sous un véritable rouleau compresseur psychologique afin d'être amenés à cautionner la guerre. Elle analyse les rouages de la propagande de guerre, de la Première Guerre mondiale à la guerre des Balkans.
Le rouleau compresseur d'aujourd'hui passe par une campagne de dénigrement sans précédent contre le PTB, bien moins innocente qu'il n'y paraît à première vue. Lire aussi : Pourquoi est-ce si important d’avoir un débat démocratique en temps de guerre.
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