Pukkelpop : l'intimidation organisée d'extrême droite ne devrait jamais être tolérée
Le 15 août, des événements graves ont eu lieu au festival Pukkelpop. Une poignée de nationalistes flamands d'extrême droite ont intimidé, scandé des messages haineux et attaqué physiquement des militantes pour le climat. Les partis nationalistes flamands N-VA et Vlaams Belang ont surtout dénoncé le fait que l'organisation a fait enlever les drapeaux utilisés par le mouvement nationaliste flamand. Par contre, l'extrême droite peut agir en toute impunité. Le PTB continue de s'opposer à cette normalisation en profondeur de la violence d'extrême droite.
Trois semaines après la vague de chaleur la plus forte jamais enregistrée dans notre pays, la militante pour le climat, Anuna De Wever a organisé au Pukkelpop une action « Clap for the Climate », comme elle l'a fait lors de nombreux festivals. Celle-ci a été accueillie tant par des applaudissements que par des huées. En soi, il n'y a rien de grave là-dedans, il s’agit de la manifestation d’une divergence d'opinion.
Si vous n'êtes pas d'accord, fermez-la
Ce qui se passe ensuite pose, cependant, un problème majeur. Une poignée de nationalistes flamands d'extrême droite ont pensé qu'il était opportun d'aller à la recherche de la jeune activiste dans le camping avec des drapeaux au lion noir du mouvement flamand dans les mains. Ils ont ouvert des tentes, saccagé une tente de fête et jeté de l'urine sur différentes filles. Ils ont crié « Dood aan Anuna », « Dood aan al de joden » (« Mort à Anuna », « Mort à tous les Juifs »). L'antisémitisme, l'intimidation physique de jeunes filles et les menaces de mort font apparemment partie du « canon flamand » (cette liste de points concernant la culture et l’histoire flamande que les élèves et les nouveaux arrivants devront apprendre, si la note de Bart De Wever pour former un nouveau gouvernement flamand se concrétise).
Le machisme à une telle ampleur et la haine croissante à l'égard des femmes sont alarmants. Il n'est pas nécessaire d'être un.e activiste du climat pour comprendre que le raid sur Anuna nous affecte tous. Le 1er mai, Schild en Vrienden (mouvement identitaire de jeunes d'extrême-droite fondé par celui qui est devenu le 26 mai 2019 député du Vlaams Belang, Dries Van Langenhove) a ciblé des syndicalistes à Gand. Le même groupe a mené des actions lors d'une grève. Leur « lutte culturelle », ils la mènent donc aussi contre les travailleurs ordinaires. La même association s'en est également pris à des militants antiracistes et au Département Genre et Diversité de l'université de Gand (Ugent). Après les jeunes activistes pour le climat suivent donc les syndicalistes, les intellectuels du « politiquement correct », les réfugiés, la société civile et tous ceux qui ne s'identifient pas à la nation flamande. Si vous n'êtes pas d'accord avec le front flamand, fermez-là, sinon l'extrême droite interviendra. Tel est le message.
Une stratégie consciente
Les drapeaux du mouvement flamand ne sont pas arrivés par hasard au Pukkelpop. Leur présence fait partie d'une stratégie consciente. Le 2 juin, les Jeunes du Vlaams Belang ont appelé à les amener aux festivals. Le premier soir de Pukkelpop, ils publient une photo des drapeaux avec la mention « PKP - le camping est à nous ». Une action politique claire, destinée à normaliser les idées xénophobes, identitaires et nationalistes auprès des jeunes. « Nous menons une lutte culturelle dans le but de conquérir les cœurs de la jeunesse flamande », explique le président des jeunes du Vlaams Belang dans le journal De Morgen. Le Vlaams Belang le fait en collaboration avec « Make Vlaenderen Great Again » une page, spécialisée dans la publication de mèmes, ces visuels qu’on retrouve sur les réseaux sociaux, et gérée par un des membres les plus actifs de Schild & Vrienden. Les personnes à l'origine de « Make Vlaenderen Great Again » ont également été impliquées dans l'incident d'il y a un an, où des jeunes ont chanté au Pukkelpop « Handjes kappen, de Congo is van ons » (« Coupons des mains, le Congo nous appartient »). Il n'y a donc aucun doute sur l'identité des personnes qui s’en sont pris à Anuna et ses amis.
Après l'incident, le service d’ordre du festival a confisqué les drapeaux litigieux. L'organisation du Pukkelpop a parlé de « drapeau noir de la collaboration », car le lion complètement noir a été utilisé par le mouvement flamand collaborateur pendant la Seconde Guerre mondiale. Il a donc une signification politique particulièrement importante. Son lion complètement noir se distingue du lion présent sur le drapeau officiel de la Flandre qui, lui, a une langue et des griffes rouges. Ce dernier n’a d’ailleurs pas été retiré par l’organisation du Pukkelpop.
Intimidation politique
Jusque-là, la N-VA et le Vlaams Belang n'avaient pas jugé nécessaire de réagir. Pour les nationalistes flamands, il est apparemment beaucoup plus important de pouvoir agiter des symboles puants que de défendre la sécurité de jeunes femmes. Car soudainement des personnalités comme Theo Francken, Tom Van Grieken, Peter De Roover et le bourgmestre de Hasselt, Steven Vandeput, se sont farouchement mis à exiger des excuses. Des excuses non pas des participants à la troupe de choc qui voulait faire taire une jeune militante par l'intimidation, mais de l'organisation qui avait insulté « leur drapeau ». Selon Francken, « la plus grosse erreur réside dans l’organisation du Pukkelpop ». Voilà donc la « Flandre inclusive où tout le monde est chez soi », mais où le ministre de l'Éducation pressenti, Theo Francken, se comporte comme le baby-sitter d’une bande violente d’extrême-droite.
Tout un débat se développe actuellement sur la nature du drapeau de la collaboration. D’ailleurs, le Vlaams Belang le distribuera encore immédiatement à l'entrée du festival. Mais à propos des actes de violence ? Plus un mot. A propos de l'intimidation physique de personnes ayant une opinion différente ? Plus un mot de plus. A propos de la croissance de l'extrême-droite ? Pas un mot. La soi-disant « muraille de Chine » entre la N-VA et le Vlaams Belang est devenue un large pont. La N-VA veut autant que possible détourner l'attention du fait que ses frères nationalistes flamands n'ont rien perdu de leur côté sombre et que celui-ci s’est au contraire aiguisé.
S'élever contre la fascisation
Il est plus important que jamais d'envoyer un signal contre ces appels à la haine et à l'intimidation. Il est grand temps de se rencontrer et de résister à la fascisation. Nous devons aller sur le terrain et parler aux gens. Toutes les forces progressistes doivent s'engager solidairement : les travailleurs et leurs syndicats, les activistes du climat et ceux qui s'opposent au racisme, les mouvements des femmes, les défenseurs des droits démocratiques.
Unir les gens est une des raisons à la base de ManiFiesta. La Fête de la Solidarité qui est organisée depuis 10 ans montre le monde tel qu'il pourrait être. Un monde où le racisme et la division n'ont pas leur place. Cette année, plus que toutes les précédentes éditions, ManiFiesta sera placée sous le signe de l'espoir et de la résistance au fascisme grandissant.