Pouvoirs spéciaux en Wallonie : il y a différentes manières de gérer une crise comme celle du Coronavirus
Ce mardi le parlement wallon a confié l’ensemble des pouvoirs au gouvernement PS-MR-Ecolo, via le mécanisme des « pouvoirs spéciaux ». Avec ce mécanisme, le gouvernement n’a plus besoin de faire voter ses lois au parlement. Il prend ses décisions seul. La raison invoquée pour introduire ce système inédit en Wallonie ? Le parlement sera bientôt dans l’impossibilité de se réunir. Le PTB s’est abstenu. Explications.
Il faut le dire clairement : la crise du Coronavirus à laquelle nous faisons face est très sérieuse. Elle nécessite des mesures fortes et cohérentes sur l’ensemble du territoire belge. Pour le PTB, la priorité absolue est la santé des gens. C’est pour ça qu’il faut pouvoir prendre des mesures directes et urgentes pour soutenir les hôpitaux, les médecins généralistes (en première ligne), les maisons de repos, etc. On doit ainsi pouvoir modifier les règles pour octroyer des permis ou des marchés publics, en urgence si nécessaire. Au PTB, nous sommes d’accord avec les partis du gouvernement à ce niveau là.
Depuis le début de cette crise, le PTB se montre d’ailleurs constructif et soutient toutes les mesures qui permettent de protéger la santé de la population. Et nous continuerons à le faire pour chaque mesure qui va dans ce sens. Ainsi, nous soutenons pleinement les mesures prises par le gouvernement wallon pour protéger les résidents des 602 maisons de repos situées en Wallonie. Ou la campagne de sensibilisation en cours sur les chaînes de télé et radio ainsi que sur les réseaux sociaux. Et le PTB soutient l’idée de débloquer des fonds pour venir en aide aux travailleurs, aux indépendants et aux petites entreprises qui voient leur revenus menacés.
Dans cette crise, le PTB est une force de proposition pour protéger la santé et les revenus de tous les travailleurs. Pour ce faire, nous nous appuyons notamment sur l’expérience et l’expertise de nos maisons médicales Médecine Pour Le Peuple. C’est cette expertise qui nous amène notamment à exiger la mise à l'arrêt le plus rapidement possible de toute la production et les services non-essentiels pour freiner la propagation du virus. C’est aussi cette expertise de terrain qui nous pousse à formuler des revendications pour protéger le revenu des travailleurs (voir les mesures proposées par le PTB : Coronavirus : 5 mesures urgentes pour protéger les travailleurs).
Le débat public et démocratique reste indispensable
Or, pour le PTB, il y a un certain nombre de mesures qui devraient être prises et qui ne le sont pas aujourd’hui. Il y a un débat sur la manière dont on doit gérer une telle crise et c’est la raison pour laquelle le débat public et démocratique est indispensable, et que l’activité parlementaire de contrôle du gouvernement doit continuer. On le voit par exemple avec le scandale autour de la pénurie de masques, ou des masques devenus plus de dix fois plus chers suite à l’épidémie (comme la révélé le PTB). Mais on le voit aussi autour des mesures de confinement : il est absurde d’interdire aux gens de se réunir entre amis mais d’envoyer les travailleurs bosser chaque jour dans leurs usines comme si de rien n’était. Depuis plusieurs jours, il y a d’ailleurs des mouvements de grogne dans plusieurs entreprises (Audi, Sonaca, Safran...) avec des arrêts de travail. Le PTB défend un lockdown complet. Comme l’a demandé Peter Mertens, président du PTB « tous les secteurs non essentiels doivent être fermés le plus rapidement possible. » L’expérience d’autres pays montre que c’est le seul moyen efficace de faire baisser la courbe des personnes infectées par le Coronavirus. C’est incompréhensible que les différents gouvernements de Belgique ne prennent pas cette mesure.
La question de la répartition du fonds de 350 millions mérite par exemple également un débat public et un contrôle parlementaire. Qu'est-ce qui sera fait de la partie « aides économiques » et « aides à l'emploi » de cette somme? Cet argent ira-t-il en priorité aux travailleurs, aux indépendants et aux PME ou aux grandes entreprises ? Comment sera-t-il dépensé ? Dans quel délai ? Pour le PTB, c’est clair : on ne peut pas donner un chèque en blanc au gouvernement.
Le maintien des débats parlementaires est nécessaire et c’est pour ça que le PTB n’a pas soutenu la proposition du gouvernement de lui octroyer les pouvoirs spéciaux. Pour rappel, Avec ce mécanisme, le gouvernement n’a plus besoin de faire voter ses décrets (lois) au parlement. Il prend ses décisions seul, sans contrôle parlementaire et de l’opposition.
Il est pourtant tout à fait possible d’adapter le fonctionnement du parlement pour respecter les recommandations de santé. On peut par exemple envisager de limiter les débats aux chefs de groupes ou à quelques députés. Ce n’est pas une question technique : c’est avant tout une question politique. La ville de Gand en est un bon exemple : en un journée, les services techniques y ont mis sur pied un système de conférence vidéo. Cela permet de continuer le travail des commissions et du conseil communal, auquel participe plus de 50 personnes, tout en respectant les recommandations sanitaires. Les parlements italiens et français ont également décidé de continuer à fonctionner. Pourquoi ce qui est possible au conseil communal de Gand ou en France ne serait pas possible en Wallonie ? Le PTB a posé la question aux partis du gouvernement (PS-MR-Ecolo)… mais ils n’ont toujours pas répondu.