Les mesures de la coalition Arizona : un recul pour les femmes et une aggravation des inégalités femmes/hommes
Les mesures de l'accord de gouvernement de la coalition Arizona vont impacter gravement les femmes, en accentuant les inégalités salariales, en compliquant la conciliation travail-famille, et en réduisant leurs droits sociaux (pensions, maladie...). Voici un tour d'horizon des principales mesures et de leurs conséquences.
1. Des pensions toujours plus faibles pour les femmes
Les réformes de l'accord du gouvernement Arizona en matière de pensions impacteront lourdement les femmes, qui sont déjà à l'heure actuelle dans des situations précaires quand elles sont pensionnées.
Les mesures qui vont impacter les femmes sont surtout :
- L'introduction d'un malus pension, réduisant les pensions pour celles qui partent avant l'âge légal. À terme, une pénalité de pension de 5 % par an de départ anticipé serait appliquée. Les femmes sont souvent dans des emplois pénibles (nettoyage, soins...), elles ne peuvent tout simplement pas travailler jusqu'à l'âge légal de la pension, c'est souvent physiquement impossible. De même, elles ont souvent des carrières incomplètes qui font qu’elles n’arriveront pas aux années de travail effectif pour échapper à la sanction. Elles seront dès lors pénalisées avec l'introduction de ce malus pension et toucheront des montants encore plus faibles qu'aujourd'hui. En moyenne, ce système de malus représentera jusqu'à 404 euros de moins par mois en cas de pension anticipée.
- Durcissement de la pension anticipée. Les travailleuses pourront partir en retraite anticipée dès 60 ans, mais uniquement si elles ont travaillé au moins 234 jours par an (l’équivalent d’un 3/4 temps) pendant 42 ans. Cela exclut de nombreuses travailleuses exerçant un métier pénible dans les soins de santé, le nettoyage, etc.
La suppression progressive de la pension de survie et de la pension de divorce. La suppression des droits dérivés (pension de survie et pension de divorce) ferait passer l’écart de pension entre hommes et femmes de 24 % à 50 % sur la base des chiffres de 2017. Le Bureau fédéral du Plan (2023) a estimé que la suppression de la pension de divorce entraînerait une perte moyenne de 145 euros par mois pour les femmes, contre 16 euros pour les hommes.
Dans l'accord de gouvernement, il est prévu de supprimer la pension de survie et de la remplacer (pour une partie des personnes) par une allocation de transition (limitée).
La pension de divorce est, elle, supprimée et remplacée par une suggestion de reprendre ça dans le contrat de mariage. Donc au lieu d'avoir un système où le conjoint divorcé a droit à une pension financée par la sécurité sociale, le plan est de suggérer aux partenaires d'inclure dans le contrat de mariage un partage des pensions en cas de divorce. Qui fera cela ?
2. Baisse des salaires : un coup dur pour les femmes
Premièrement parce que la loi de blocage des salaires (au moins jusqu'en 2027) freine toute tentative de réduction des inégalités salariales, impactant fortement les secteurs féminisés où les rémunérations sont historiquement plus faibles.
Ensuite, parce que le report du début du travail de nuit de 20h à minuit dans le secteur de la distribution supprimera progressivement les primes majorées pour les heures travaillées en soirée et le dimanche. Cette mesure impactera directement les salariées de ce secteur féminisé, où le travail en soirée et le week-end est fréquent. La disparition de ces compensations aggravera la précarité économique des femmes et creusera davantage l'écart salarial entre les genres.
Enfin, le gouvernement permet aux employeurs d’imposer aux travailleuses jusqu’à 240 heures supplémentaires par an, sans l’accord des syndicats et sans rémunération supplémentaire. Cela représente plus de cinq heures supplémentaires par semaine. Plus de flexibilité, mais sans compensation. Prenons l’exemple de Marie, une coordinatrice de chantier avec une semaine de travail de 40 heures. Aujourd’hui, si elle travaille 45 heures pour terminer un projet, elle reçoit un sursalaire de 50 % ou des heures de récupération. À l’avenir, cette compensation risque de disparaître.
3. Une conciliation travail-famille de plus en plus difficile
La flexibilisation des horaires de travail, incluse dans l'accord, met en place des horaires « en accordéon » et l'annualisation du temps de travail (la semaine de 38h sera calculée sur l'année et non plus sur la semaine), supprimant les minima horaire journaliers et hebdomadaires. La semaine de 38 heures et les journées de 8 heures sont tout simplement balayées. La règle, c’est qu’il n’y en a plus : on pourrait avoir des semaines prévoyant 48 heures de travail et d'autres beaucoup moins, rendant l'organisation familiale bien plus compliquée qu'aujourd'hui encore.
L'accord de gouvernement prévoit aussi la levée des restrictions sur le travail du dimanche et de nuit, rendant la conciliation travail-famille quasi impossible. Même si cela doit se faire avec l'accord du travailleur, quelle femme pourra encore dire à son patron, non je ne viens pas travailler le dimanche ?
Les femmes, qui assument majoritairement les responsabilités domestiques, seront contraintes de réduire leur temps de travail ou de quitter l'emploi, ce qui impactera leur autonomie financière et aggravera leur précarité à long terme, notamment en matière de pension.
4. Chasse aux malades de longue durée : une double peine pour les femmes
Les femmes représentent 60 % des malades de longue durée en Belgique, en raison de leur forte présence dans les secteurs pénibles et de la double charge travail-famille. Les troubles musculo-squelettiques et psychiques, souvent causés par des conditions de travail difficiles, sont courants chez elles.
L'accord de gouvernement prévoit un renforcement des obligations de réintégration et des mécanismes de contrôle, limitant potentiellement la durée des prestations pour maladies longues. Ces mesures pousseront de nombreuses femmes à reprendre le travail alors qu'elles ne sont pas prêtes, ou à subir une perte de revenus supplémentaire.
5. L'IVG à nouveau au frigo
Aucun engagement ferme pour élargir le droit à l'avortement. Tout au mieux une phrase qui parle d'un consensus à envisager entre les partis du gouvernement. De quoi mettre encore le débat de l'élargissement du droit à l'avortement au frigo pour des années.
6. La lutte contre les violences faites aux femmes : ce qui est donné d'une main est reprise de l'autre
Des mesures de lutte contre les violences sont présentes dans l'accord du gouvernement. On peut souligner notamment le renforcement des CPVS (Centre de prise en charge des violences sexuelles) ou encore l’extension des cellules EVA (Emergency Victim Assistance) au niveau de la Police. Aucune mention par contre de la question de la violence sur le lieu de travail et de l'application de la Convention 190 de l'OIT (Organisation Internationale du Travail) sur la violence et le harcèlement au travail. Toutes les attaques sur les travailleuses qui sont prévues vont précariser davantage les femmes et les rendre encore plus vulnérables aux violences au travail ou au sein du ménage. La précarité empêche les femmes de porter plainte de peur de perdre leur emploi. De même, il est beaucoup plus compliqué d'échapper à la violence conjugale quand on a de faibles revenus. Alors des améliorations, mais à quel prix ?
Les mesures proposées par la coalition Arizona représentent donc un véritable recul pour les droits des femmes. Elles accentuent la précarité économique, creusent l'écart salarial entre les femmes et les hommes, compliquent l'équilibre travail-famille et fragilisent les protections sociales durement acquises.
Nous devons et nous pouvons arrêter les plans de ce gouvernement des casseurs. Les syndicats et les travailleurs et travailleuses se mobilisent déjà en force depuis le mois de décembre. Plus de 30 000 dans les rues le 13 janvier dernier. On a vu les enseignants également qui, par leur mobilisation massive, on mit les négociateurs sur la défensive, aussi à 30 000 dans les rues le 27 janvier. Le mouvement des femmes peut aussi faire reculer cette coalition et ses plans en préparation. Il sera donc important de se mobiliser massivement le 13/02 à l'appel des syndicats. Et le 8 mars pour l'appel à la grève des femmes. Nous pouvons gagner.
Rendez-vous le 13 février à Bruxelles
Les syndicats appellent à une grande manifestation contre le gouvernement des casseurs le 13 février prochain. Le mouvement est aussi soutenu par de nombreux acteurs de la société civile et du monde associatif. Comptez sur notre soutien et notre présence en force.
Rendez-vous le 13 février à 10h30 à la Gare du Nord à Bruxelles.
Ensemble, arrêtons les plans du gouvernement des casseurs.