Le PS, le MR et Ecolo refusent une commission d’enquête sur la gestion du Covid-19 dans les maisons de repos : de quoi ont-ils peur ?
Le 27 mai, le PTB a introduit au Parlement wallon une proposition de résolution visant à mettre en place une commission d'enquête parlementaire chargée de faire la lumière sur la gestion de la crise du Covid-19 dans les maisons de repos. Trois semaines plus tard, le 16 juin, cette proposition a fait l’objet d’un vote en commission. La majorité, composée du PS, du MR et d’Ecolo, s’y est opposée.
Incompréhensible. Plus de 2 000 personnes sont décédées dans les homes de la Région. Cela veut dire que deux tiers des décès liés au coronavirus en Wallonie sont des résidents de maison de repos. Les professionnels du secteur et les familles endeuillées demandent légitimement des explications sur cette tragédie. La situation dans les maisons de repos a été dramatique, au point qu’on a même été obligé de faire intervenir l’armée. Pourtant, la ministre wallonne de la santé Christie Morreale (PS) et son gouvernement défendent que « le job a été fait »…
Face à la gravité de ce qu’il s’est passé, il faut pouvoir établir de manière claire les responsabilités et les mécanismes en cause. C’est indispensable si on veut éviter de répéter les mêmes erreurs. Mais la majorité wallonne ne veut pas de cette commission d’enquête. Dire, comme elle l’a fait, qu’une évaluation est nécessaire sans préciser quand et comment revient à mettre cette histoire aux oubliettes et à fermer les yeux sur la situation en maisons de repos une seconde fois.
Quels sont les arguments utilisés par le PS, le MR et Ecolo pour justifier leur refus ?
1. « Nous ne voulons pas d’une chasse aux sorcières. »
La majorité wallonne ne veut pas d'une commission d'enquête qui serve à montrer du doigt les responsables de la gestion de cette crise. Il est pourtant tout à fait normal que les familles et les professionnels du secteur attendent des explications de la part des responsables politiques qui ont géré la crise. Les travailleurs du secteur ont, eux, été obligés, malgré le manque de matériel de protection, de tests, de renfort et de protocoles, de prendre leurs responsabilités jusqu'au bout. Et ils l'ont fait avec brio. C'est maintenant au tour du personnel politique de prendre ses responsabilités jusqu'au bout.
2. « Les responsabilités se situent à différents niveaux de pouvoir. »
Si c'est vrai que les compétences de gestion de crise sont en partie fédérales, la dernière réforme de l'État (votée par l'ensemble des partis traditionnels) a donné la gestion des maisons de repos aux Régions, et des questions se posent sur cette gestion :
- Pourquoi n'y avait-il pas de stocks stratégiques d'équipement de sécurité dans les maisons de repos, alors qu'on a connu d'autres pandémies de coronavirus (comme le SRAS et le MERS par exemple) ?
- Pourquoi la Région a-t-elle refusé par deux fois une livraison directe de masques par les instances fédérales ?
- Pourquoi la Région, présente dans le CNS, a-t-elle accepté les arrêtés qui prévoyaient la réquisition du personnel sans concertation avec le secteur et les travailleurs ?
Ce sont des questions auxquelles la ministre de la Santé Christie Morreale (PS) doit répondre, ainsi que l’ensemble du gouvernement wallon.
Par ailleurs, ne serait-il pas temps de tirer les conclusions de cette situation complètement absurde, où les responsabilités en termes de santé sont réparties entre neuf ministres, et de décider qu'à l'avenir il n’y aura plus qu’un ou une ministre de la Santé en Belgique ? En tous les cas, le chaos institutionnel dont sont responsables les partis traditionnels ne peut leur servir d’excuse pour se dédouaner de leurs responsabilités dans la gestion de la crise du Covid-19.
3. « La commission d’enquête n’est pas le bon outil. »
Que du contraire. Une telle commission permettrait d’explorer l’ensemble des documents qui peuvent éclairer la manière dont cette crise a été gérée et de convoquer les personnes nécessaires pour qu’elles apportent des informations utiles ou qu’elles s’expliquent.
4. « Ce n’est pas bon timing, car on doit se préparer à une éventuelle seconde vague. »
Justement : comment se préparer à une seconde vague (dont personne ne connaît évidemment ni le timing ni l’ampleur) sans tirer rapidement les leçons de la première ? Il est indispensable de déterminer comment des morts auraient pu être évitées dans les maisons de repos.
De quoi le PS, le MR et Ecolo ont-ils peur ?
Les arguments avancés par la majorité wallonne sont de faux prétextes. La véritable question qui se pose, c’est de quoi le PS, le MR et Ecolo ont-ils peur ? Si la crise avait été aussi bien gérée qu’ils le prétendent, pourquoi refuser qu’une commission d’enquête fasse la lumière sur ce qui s’est passé dans les maisons de repos ?
Le PTB continuera le combat pour que cette commission voit le jour et qu’on puisse en tirer les leçons qui s’imposent.