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La grande révolution de l'hydrogène : comment une planification écologique peut sauver le climat

Nous pouvons encore sauver le climat. Le PTB a un plan, qui mise sur la technologie de l'hydrogène. Pour le mettre en œuvre, il va falloir changer radicalement et opter pour une planification écologique. Bref, opérer une révolution climatique. Le 2 décembre, le PTB portera ce plan lors de la manifestation Claim the Climate à Bruxelles.

Mardi 27 novembre 2018

Le 2 décembre prochain, la plateforme Claim the Climate appelle à la plus grande manifestation pour le climat que la Belgique ait jamais connue. Et nous comptons bien y contribuer. Retrouvez toutes les infos ici.

Il est encore temps de sauver le climat. C’est ce que souligne le dernier rapport des experts climatiques de l’ONU (Giec). Celui-ci pointe l’urgence de mettre en œuvre des solutions radicales et d’une ampleur sans précédent pour limiter à 1,5° le réchauffement de la planète.

Autrement, les conséquences seront catastrophiques pour la planète… et les gens. Dans de nombreux endroits du globe, on le sent déjà. Ici aussi, canicules et inondations nous donnent un petit avant-goût de ce que pourrait devenir le climat si on dépasse ce réchauffement de 1,5°C.

Pour y arriver, l'activité humaine ne peut plus émettre davantage que 420 gigatonnes de CO2 au total. Au rythme actuel de 40 gigatonnes par an, cela nous donne encore environ dix ans. Autant dire qu’il y a urgence. C'est pourquoi d'ici 2030, nous devons arriver à diminuer de plus de moitié les émissions de gaz à effet de serre au plan mondial.

La technologie d’utilisation de l’hydrogène existe depuis de nombreuses années, mais est sous-exploitée

Le PTB veut donc suivre les recommandations scientifiques demandant de réduire en 2030 déjà les rejets de 60 %. L’objectif est ensuite d’avoir une économie complètement neutre en 2050. C’est là que l'hydrogène entre en jeu.

Je renforce la révolution climatique

 

L'hydrogène, carburant de la révolution climatique

Le réchauffement de la Terre est dû à l’augmentation de la présence de gaz à effet de serre dans l’atmosphère. Et c’est l’activité humaine qui, depuis la révolution industrielle, a produit des masses considérables d’émissions de CO2, un gaz à effet de serre.

Ces émissions sont elles-mêmes dues à la combustion de carburants fossiles (pétrole, charbon, gaz naturel) pour la production d'électricité ou pour le fonctionnement des moteurs et des machines.

C’est donc de cette économie qui tourne autour du carbone (carburants fossiles) qu’il faut sortir. La meilleure alternative est de passer à une économie de l’hydrogène.

La technologie d’utilisation de l’hydrogène existe depuis de nombreuses années, mais est sous-exploitée. L’hydrogène peut servir, entre autres, à produire et à stocker de l'électricité, comme carburant dans des moteurs spéciaux et même comme produit de base pour la pétrochimie.

La production d'une énergie à 100 % renouvelable est possible

Une révolution énergétique

L’énergie est au cœur du débat sur le climat, étant donné que la plus grande partie des émissions de gaz à effet de serre est liée à la production ou à l’utilisation de l’énergie. Pour être complètement neutres vers 2050, nous devons sans tarder tout mettre en œuvre pour passer aux énergies renouvelables. En Belgique, on mise surtout sur les panneaux solaires, complétés par des éoliennes.

La production d'une énergie à 100 % renouvelable est possible, mais se heure à un problème : le soleil ne brille pas en permanence et la présence et l'intensité du vent sont très variables. Cependant, au moment où les panneaux solaires et les éoliennes produisent trop, on peut utiliser cette électricité pour provoquer une réaction chimique qu’on appelle électrolyse de l’eau (qui sépare l’eau en hydrogène, d’une part, et oxygène, de l’autre). On produit ainsi de l’hydrogène qui peut être stocké et facilement retransformé plus tard en courant électrique.

Pour optimaliser l'utilisation et la distribution de l'énergie, il faudra aussi passer à un réseau de distribution d’énergie décentralisé, avec de nombreuses coopératives d’énergie locales et des sociétés électriques urbaines. Nous devons investir dans un réseau intelligent (smart grid), qui coordonne les différents flux d’entrées et de sorties et veille à ce qu’il n’y ait jamais ni pénuries ni excédents

Goeree-Overflakkee : une île avec une mission

L’île hollandaise Goeree-Overflakkee se trouve dans la province de Hollande-Méridionale et compte environ 50 000 habitants. Les autorités locales et régionales ont l’ambition d’être climatiquement neutres déjà avant 2020. L’objectif est même de livrer de l’électricité verte au port de Rotterdam. Pour cela, elles comptent sur une utilisation massive de la technologie de l'hydrogène. Le projet a commencé avec la construction des installations de production d’hydrogène sur la base de l’électricité verte fournie par des parcs éoliens et des panneaux solaires. Après ont suivi la construction d’une usine d’engrais, qui transforme l’hydrogène en ammoniaque, et la fourniture d’hydrogène au réseau local de gaz naturel. Ensuite, on a placé deux points de recharge d’hydrogène pour voitures, et les bus roulent à l’hydrogène. Le projet prévoit également des panneaux solaires collectifs dans des collectivités de résidents. Comme quoi, c’est possible.

 

Une révolution pour la pétrochimie et l’industrie

En Belgique, seulement 300 grandes entreprises sont responsables de 40 % des émissions

En Belgique, seulement 300 grandes entreprises sont responsables de 40 % des émissions. Pensons par exemple aux hautes cheminées de la production électrique, de la pétrochimie et de la production d’acier. L’hydrogène peut être de différentes manières la bouée de sauvetage verte pour notre industrie lourde, et pour la pétrochimie en particulier.

On peut en effet capter le CO2 qui se libère lors des combustions industrielles et, en le faisant réagir avec de l’hydrogène (produit par le processus d’électrolyse décrit ci-dessus, par exemple), on peut produire du méthane et du méthanol. Le méthane peut remplacer le gaz naturel et le méthanol peut servir comme matière première pour la pétrochimie. Ainsi, nous créons des circuits quasi fermés. Appliquez ceci sur 220 des plus grosses cheminées en Flandre et l’émission belge diminue déjà au moins de 20 % !

Par ailleurs, on pourrait utiliser la chaleur résiduelle de l’industrie pour chauffer des villes entières par des réseaux de chaleur souterrains (lire ci-dessous).

Une révolution pour le transport et la mobilité

Le transport et le trafic routier représentent près d’un quart des émissions des gaz à effet de serre en Europe. Les trams électriques, les trains et le métro doivent être au cœur de notre mobilité. Toute notre planification urbaine doit être revue dans ce but. Des pistes cyclables séparées et des autoroutes cyclistes doivent aussi être généralisés.

Il existe aussi des bus à hydrogène. Et « made in Belgium » avec ça !

Et, là aussi, l’hydrogène est la clé. Des trains tirés par des locomotives à l’hydrogène offrent en effet une solution pour des lignes de train non électrifiées. Dans le Land allemand de Basse-Saxe, le Coradia iLint, mieux connu sous le nom de Choo Choo, circule déjà maintenant entièrement à l’hydrogène sur une distance de 100 km.

Il existe aussi des bus à hydrogène. Et « made in Belgium » avec ça ! L’usine malinoise de Van Hool trouve partout dans le monde des acheteurs pour ses autobus à l’hydrogène, sauf en Belgique. Pourquoi ? Parce qu’il n’y a que deux points de recharge sur le territoire.

Enfin, il existe également des voitures particulières à l’hydrogène, et on peut transformer les pompes à essence en points de recharge à hydrogène. Cependant, il est aussi nécessaire de diminuer proportionnellement le nombre de voitures particulières en faveur des transports publics, en stimulant sensiblement l’offre et la ponctualité de ces services et en les rendant gratuits dans les grandes villes.

Pour accompagner tout cela, et afin que cela soit réellement efficace, il faut aussi que le transport des marchandises soit transféré au maximum des autoroutes vers les voies navigables et les voies ferrées.

Le vrai problème n’est pas technologique, mais politique.

De même, il faudrait promouvoir le TGV pour les voyages de moyenne distance.

La planification écologique

La piste de l'hydrogène offre donc de très nombreuses possibilités de rendre en peu de temps notre économie climatiquement neutre. Et, avec cela, sauver le climat et éviter les conséquences catastrophiques d’un réchauffement de la Terre de plus d’1,5°C.

Cependant, il faut savoir que la plupart des technologies discutées sont déjà passablement anciennes. Le vrai problème n’est pas technologique, mais politique.

Les partis traditionnels ne veulent toujours pas instaurer de mesures allant à l'encontre des intérêts du marché et du grand capital. Et ce, même si prétendues solutions apportées par le marché ont largement démontré leur faillite. Le commerce des droits d'émissions a créé un nouveau marché lucratif pour les grandes entreprises, mais n'a aucunement fait baisser leurs émissions.

Tout ceci demande une planification écologique, une approche collective, globale, planifiée et cohérente

Le nouvelle recette, proposée entre autres par le président français Emmanuel Macron, et une « taxe carbone ». Il est d’ailleurs suivi là-dedans par le gouvernement Michel, mais aussi par les écologistes et les sociaux-démocrates depuis l’opposition. Or une telle taxe va certes coûter de l'argent au consommateur, mais elle n'entraînera pas de changement important dans les investissements, sans parler même d’une conversion fondamentale de notre infrastructure économique.

Le défi qui nous attend consiste à mettre sur pied un nouveau système économique. Cela ne se fera qu’en sortant de la logique du marché et en se heurtant au lobbying des multinationales polluantes.

Car les multinationales n’investissent que s’il y a du profit à se faire. Et elles le font chacune dans son coin, dans une logique de concurrence et du chacun pour soi. Certaines entreprises investissent ainsi encore annuellement des dizaines de milliards dans la quête de nouveaux carburants fossiles. Un désastre pour le climat.

C’est pourquoi tout ceci demande une planification écologique, qui dépasse toutes les entreprises individuelles, une approche collective, globale, planifiée et cohérente. Cela nécessitera aussi de grands investissements publics, qui peuvent aussi être une aubaine en termes d’emplois. Pour faire la transition de l’industrie vers l’hydrogène, on a besoin de constructeurs de machines, spécialistes des pompes, électriciens, tuyauteurs, opérateurs…. Tout du travail de haute qualité, qui doit être bien payé. Pour le PTB, la transition écologique ne peut en effet qu’être sociale, en garantissant l’emploi et en faisant porter les charges les plus lourdes sur les épaules les plus larges.

Je rejoins la révolution climatique

 

Un plan climatique pour la Belgique

Pour réaliser ce plan du PTB, dont l'objectif doit être la neutralité climatique en 2050, les principaux investissements doivent se faire dès maintenant. C'est pourquoi le PTB suit les recommandations scientifiques demandant de réduire en 2030 déjà les rejets de 60 % et de tirer 75 % de la production d'électricité de l'énergie renouvelable.

Le PTB veut 10 milliards d'euros d'investissements supplémentaires par an dans la transition écologique :

  • 5 milliards d'euros d'initiative publique dans l'énergie renouvelable, dans les réseaux de chaleur et les smart grids. Pour cela, nous créerons une Banque d'investissement climatique (BIC) en suivant l'exemple de l'Allemagne.
  • 5 milliards d'euros d'investissements par les principaux pollueurs, les 300 grandes entreprises qui prennent à leur compte 40 % des rejets belges de CO2. Nous voulons quitter le système ETS de commerce des émissions, qui a prouvé son échec, et nous imposerons des normes contraignantes à la grande industrie afin qu'elle réduise ses propres rejets d'au moins 10 % par an, sous peine de lourdes amendes.

Afin d'assurer le suivi et la coordination de la planification écologique, toutes les compétences climatiques doivent de nouveau être fédéralisées et placées sous la responsabilité d'un seul ministre, et non plus de quatre ministres qui se rejettent la responsabilité les uns aux autres. Le Bureau fédéral du plan doit créer un département spécial qui sera chargé de l'élaboration de la planification écologique.

 

Le Danemark, pionnier de la cogénération

Au Danemark, on ne voit pas de cheminées dans les villes. Dans toutes les grandes villes, il existe un réseau de chaleur de chauffage urbain. Il est alimenté par récupération de la chaleur industrielle, par de vastes champs de panneaux solaires et par des centrales locales qui appliquent la cogénération (la production combinée chaleur-électricité). La chaleur est stockée dans des grandes citernes isolées d’eau chaude. Avec cette eau, on chauffe les maisons par un réseau souterrain et on fournit l’eau chaude sanitaire. Quand les éoliennes et les panneaux solaires ne produisent pas assez d’électricité, les centrales de cogénération transforment la chaleur en électricité. À l’inverse, quand les panneaux solaires et les éoliennes produisent trop d’électricité, on arrête la cogénération et on utilise l'excédent de courant pour produire de l’eau chaude destinée à remplir les citernes. Le Danemark a choisi cette technologie dans les années 1970 au lieu de l’énergie nucléaire, comme le faisaient la plupart des pays européens à l'époque. Aujourd'hui, le Danemark possède le réseau de distribution le plus fiable en Europe. Ceci montre comment l’énergie nucléaire constitue un obstacle pour le développement de l’énergie durable.