Grâce à un mouvement de grève massif, les syndicats et le personnel de Lidl arrachent des mesures contre la charge de travail élevée
Après cinq jours de grève dans la chaîne de supermarchés Lidl, la direction a été contrainte de faire d'importantes concessions pour réduire la charge de travail intenable. Un préaccord a été annoncé mardi. Le personnel réclame, entre autres, plus de considération et de meilleures conditions de travail, ce qui ne s'est jamais concrétisé, malgré tous les efforts fournis pendant la crise du coronavirus.
Après cinq jours de grève dans la chaîne de supermarchés Lidl, la direction a été contrainte de faire d'importantes concessions pour réduire la charge de travail intenable. Un préaccord a été annoncé mardi. Le personnel réclame, entre autres, plus de considération et de meilleures conditions de travail, ce qui ne s'est jamais concrétisé, malgré tous les efforts fournis pendant la crise du coronavirus.
Le personnel de Lidl ne se laissera pas faire. C'était déjà clair en 2018 lors de la vague de grève dans les magasins qui avait obligé la direction à déployer plus d'heures et plus de personnel. Mais après un an et demi de crise du coronavirus, et encore plus de pression pour augmenter les bénéfices, la charge de travail dans les magasins était redevenue insoutenable.
Mercredi 13 octobre, un tiers des magasins Lidl en Belgique ont gardé leurs portes fermées. Lorsque le front commun syndical a appelé à la fermeture du plus grand nombre possible de succursales le samedi suivant, plus de 190 magasins se sont mis en grève, sur environ 300. Après le week-end aussi, des dizaines de magasins sont restés spontanément fermés.
Une mobilisation aussi réussie n'a été possible que grâce aux nombreux travailleurs des magasins qui ont rejoint le mouvement de grève pour la toute première fois.
« Chaque jour, je reçois un appel pour commencer plus tôt ou rester plus tard »
La flexibilité chez Lidl est énorme. De nombreux membres du personnel n’ont que des demi-contrats, mais se voient attribuer un tel nombre d'heures supplémentaires que cela devient un travail à plein temps.
Beaucoup de personnes travaillent depuis des années avec de petits contrats, et à chaque fois, un contrat pour un nombre d'heures supérieur leur est refusé. « On a un contrat de 24 heures, mais s'ils le souhaitent, ils peuvent nous planifier pour 36 heures, explique une employée au piquet de grève. Et cela sans nous rémunérer comme pour des heures supplémentaires ! »
« Chaque jour, on m'appelle pour que je commence plus tôt ou reste plus tard, poursuit-elle. “Tu n’as quand-même pas de vie privée”, me disent-ils. Mais un contrat à plein temps, ça, il n’en est pas question. Des gens doivent venir préparer les fruits et légumes le matin, et sont ensuite envoyés dans un autre magasin. »
Être seul pour garder ouvert tout le magasin
À un autre piquet de grève, nous entendons une histoire similaire : « Nous sommes trois ici pour gérer la boutique : préparer les fruits et légumes, faire la boulangerie, préparer les affichages, nettoyer. Mais en fait, nous devrions être cinq, plus une personne en standby. Essayez un peu de maintenir ce rythme pendant des jours et des jours ! Nous voulons du respect, un peu de considération pour le travail que nous faisons. » Même les demandes de vêtements de travail restent lettre morte.
À un piquet de grève à Gand, nous apprenons que, la semaine avant la grève, une employée avait gardé le magasin ouvert tout seul. Une collègue raconte qu'elle a fait sept heures supplémentaires en plus de ses 35 heures, alors qu'elle était malade et que le médecin lui avait dit de rester à la maison. « Parce que si vous appelez pour dire que vous êtes malade, on vous dit : arrangez-vous pour venir au plus vite. »
Malade à cause des conditions de travail
Le personnel doit réapprovisionner les rayons toutes les 20 minutes, ce qui est impossible. En plus du travail régulier, il y a le travail supplémentaire avec quatre campagnes de promotion par semaine, alors qu'il y a un manque constant d’effectifs. S'il n'y a pas assez de monde, ces produits resteront là jusqu'à ce qu'ils aillent dans un autre magasin.
On n’a pas non plus le temps de prendre une pause : « Pour un shift de plus de quatre heures, on a droit à une pause de 15 minutes. Si on veut manger quelque chose, il faut d'abord débadger, s’acheter à manger. Tout achat doit être signé par la personne responsable. Et alors votre pause est terminée. » Il n’y a donc rien de surprenant à ce que de nombreuses personnes tombent malades à cause de ces conditions de travail.
Des clients compréhensifs
Autant de raisons, donc, pour ne plus se laisser faire et pour contraindre la direction à prendre des mesures. Il faut également souligner le soutien et la compréhension des clients. Ils voient bien à quel point le travail est difficile dans les magasins. « Vous avez plus que raison d’agir, il faut vraiment que ça bouge », disent souvent les clients aux grévistes.
Des victoires solides
Les résultats obtenus dans le préaccord après cinq jours de grève sont des victoires solides : les 42 heures supplémentaires par magasin qui étaient menacées seront conservées, et des chronométrages seront effectués afin de procéder à une évaluation réaliste de ce que devrait être un niveau d’effectifs viable.
L'équipe volante sera également élargie afin de venir aider les magasins en sous-effectif. Celle-ci comptera 223 employés. Il y aura 14 heures contractuelles supplémentaires par succursale jusqu'en juin de l'année prochaine. Les salariés qui obtiendront un contrat avec davantage d'heures pourront opter pour cela, et les contrats pour les nouveaux candidats seront également améliorés. Les « filiales à problèmes » où le manque de personnel est le plus aigu en raison de maladies ou de circonstances particulières, feront l’objet d’une nouvelle politique. Celles-ci se verront attribuer 24 heures contractuelles supplémentaires. Par rapport aux projets de la direction d’avant la grève, ce paquet de mesures aura un impact pour 750 emplois chez Lidl.
Lutte et solidarité contre la pression au travail
Le contexte de cet accord préliminaire est important : le gouvernement veut rendre le marché du travail plus flexible en rendant possible la semaine de quatre journées de travail de 10 heures et en cherchant à rendre le travail de nuit moins cher et plus étendu. C'est tout le contraire d'une politique qui vise à lutter contre l'augmentation inquiétante des maladies de longue durée.
Pour lutter contre ce problème, il faut suivre l’exemple des travailleurs de Lidl : obliger les directions, qui organisent des emplois précaires pour maximiser les profits, à restituer beaucoup plus de richesses aux travailleurs. Les obliger à recruter et à réduire la charge de travail.