« Entrave méchante » à nos droits démocratiques
Lors de la grève générale du 19 octobre 2015 contre le gouvernement Michel, des syndicalistes ont mené diverses actions. Suite à l’une d’elle, à Liège, 17 personnes ont été condamnées pour « entrave méchante à la circulation ». Lors de leur appel, la FGTB a organisé un rassemblement, auquel de nombreux militants du PTB ont participé.
« Je reviens du rassemblement "Syndicalistes, pas criminels". Il y avait beaucoup de monde pour défendre les 17 syndicalistes liégeois », a réagit Raoul Hedebouw, porte-parole national du PTB, ce mardi 21 septembre. « La solidarité est au rendez vous et le message est clair : la condamnation doit purement et simplement être annulée. »
Accueillis par une énorme haie d'honneur, les 17 étaient auditionnés dans le cadre de leur appel contre la condamnation, basée sur l'article 406 du code pénal, « entrave méchante à la circulation ». Or, selon le porte-parole du parti de gauche, « cet article doit servir à condamner les criminels de la route, pas les militants syndicaux ».
Attaque globale des droits syndicaux
A l’origine, cet article ne devait en effet pas être utilisé contre les travailleurs en lutte pour leurs droits. Explications de l’avocat spécialiste du droit de travail et professeur à l’ULB et à l’université d’Anvers, Jan Buelens : « Cet article date du 19e siècle et a été renforcé après la grève de l’hiver 1960-1961. Après ce mouvement massif contre la loi unique, le pouvoir en a profité pour étendre une disposition datant du siècle précédent disant qu’on ne pouvait bloquer une voie de chemin de fer. Il a étendu cette interdiction aux voies routières. Ils ont donc été condamnés pour « entrave méchante à la circulation ». Quand cette loi est renforcée en 1961, les députés socialistes disent qu’elle ne peut pas être utilisée contre le droit de grève. Les autres familles politiques disent que non, elle ne sera pas utilisée contre le droit de grève. Mais à partir de 2014, le ministère public utilise cet article pour attaquer politiquement et pénalement les syndicalistes. »
Cette décision d’utiliser pénalement cet article n’est pas anodin : cela entre dans une attaque globale des droits syndicaux et des droits démocratiques, comme l'a rappelé Thierry Bodson, président de la FGTB, qui fait partie des 17 condamnés : « Cette condamnation est grave. Ce sont les libertés syndicales et le droit de manifester qui sont attaquées. Ce jugement ne peut pas être un cas d'école. Si on est condamné, il sera difficile d'obtenir des avancées sociales. Derrière ce jugement, il y aussi une question démocratique. La démocratie, ce n'est pas seulement le droit de vote, c'est aussi le droit à l'expression des travailleurs. »
Sans blocage, pas d’avancées sociales
Joel Thone, président de la FGTB Liège, a lui aussi été très clair : « Merci d'être venu des 4 coins de la Belgique. La justice veut condamner notre organisation syndicale. Ce qui se passe, est extrêmement important. Et inacceptable. Nous irons jusqu'au bout pour empêcher cette condamnation. »
Car, comme le rappelle Jan Buelens, « chaque action efficace, qui a permis nos conquêtes sociales, était impossible sans blocage. Sans bloquer la circulation, nous n’aurions pas de lois sociales ».
Ces attaques dépassent les syndicats : tous les citoyens peuvent être concernés. Si une association de parents d’élèves veulent dénoncer un carrefour dangereux pour les enfants et organise une action de sensibilisation sur la route, par exemple, les participants peuvent aussi être condamnés.
Conclusion de Raoul Hedebouw : « Nous sommes de tout cœur avec les camas syndicalistes. On lâche rien ! »