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Comment l'Arizona casse aussi les soins de santé

Nous traversons une crise des soins de santé. La charge de travail dans ce secteur a explosé ces dernières années. De plus en plus de soignants quittent le secteur ou tombent malade. Les personnes qui ont besoin de soins doivent attendre de plus en plus longtemps avant d’en bénéficier. De plus, la qualité des soins est compromise. Ce n'est pas un hasard, mais le résultat d'années de choix politiques qui ont sous-financé et sous-évalué les soins de santé. Différents partis du nouveau gouvernement Arizona annoncent qu'ils s’apprêtent à sauver le secteur des soins en y investissant des milliards. Quelle est la part de vérité dans cette déclaration ? Le PTB a examiné de près l'accord gouvernemental.

Mercredi 5 février 2025

Sofie Merckx (au centre), cheffe de groupe PTB à la Chambre, lors d'une action pour le refinancement des soins de santé.

L'Arizona économise-t-elle ou investit-elle dans nos soins de santé ?

Outre l’indice santé, c'est la norme de croissance qui détermine le pourcentage d'augmentation annuelle du budget. Selon les calculs du Bureau du Plan, un taux de croissance de 3,2 % est nécessaire entre 2025 et 2029 pour maintenir la même qualité de soins pour une population vieillissante. La Vivaldi a pourtant fixé la norme de croissance à 2,5 %. Un taux insuffisant, donc. Les soins de santé accusent déjà un retard important avant même le début de ce nouveau gouvernement.

Pour convaincre leurs militants d'entrer dans ce gouvernement de casseurs, les présidents des partis de l'Arizona ont annoncé des milliards d’euros d'investissements dans les soins de santé. Ils ne savent que trop bien que personne ne veut de leurs mesures antisociales. Vooruit affirme que 3,9 milliards d'euros seront investis via la norme de croissance, CD&V parle de 5,4 milliards, et les Engagés avancent même le chiffre de 12 milliards. C’est de la surenchère. Mais qu'en est-il réellement ?

Selon les tableaux budgétaires, les soins de santé devront se contenter de 523 millions d'euros de moins, et non de plus

Selon les tableaux budgétaires, les soins de santé devront se contenter de 523 millions d'euros de moins, et non de plus. Pour ce faire, l'Arizona baissera la norme de croissance actuelle de 2,5 % à 2 %, pour ne la relever à 3 % qu’en 2029. Ces mesures d’austérité ont des conséquences durables pour le secteur des soins de santé.

Par rapport à la norme de croissance de 3,2 % estimée nécessaire par le Bureau du Plan, cela représente une économie de plus d'un milliard et demi d'euros. Ce sont des milliards d’euros en moins, bien loin des « investissements » annoncés. Les besoins du personnel et des patients seront soumis à une pression accrue.

L'Arizona n'a aucun respect pour le personnel soignant

Le travail dans le secteur des soins de santé est physiquement et mentalement épuisant, difficilement compatible avec une vie privée, et sous-payé par rapport à la charge de travail, à la flexibilité et aux responsabilités qui lui sont propres. Lors de la crise du Covid, tout le monde a applaudi le personnel soignant. Aujourd’hui, ce dernier se prend une gifle en plein visage de la part de l’Arizona.

D'une part, le personnel soignant est durement touché par la vaste attaque de l'Arizona contre les salaires, les pensions et les conditions de travail de la classe travailleuse. Pour l’Arizona, le personnel soignant devra également travailler plus pour moins de pension. Les aménagements de fin de carrière deviennent moins accessibles et ne sont plus pris en compte dans le calcul du montant de la pension. Une carrière complète est presque irréalisable dans le secteur des soins de santé, où les femmes sont très fortement représentées. Les personnes qui arrêtent de travailler avant 66 ans perdront une partie de leur pension. Pendant leur  carrière, elles subiront une augmentation de la flexibilité et la charge de travail. Les heures supplémentaires deviendront normales, avec entre autres jusqu’à 45 heures de travail par semaine sans indemnité supplémentaire. La porte est ouverte pour autoriser les flexi-jobs dans le secteur des soins de santé. L'interdiction du travail de nuit sera également levée, ce qui, à terme, mènera à une moins bonne rémunération du travail à des horaires irréguliers.

Le personnel soignant est durement touché par l'attaque de l'Arizona contre les salaires, les pensions et les conditions de travail de la classe travailleuse

D'autre part, l'Arizona, sous la pression des syndicats, promet un accord social pour le secteur non-marchand. Mais un accord social sans budget ne laisse pas beaucoup de place aux investissements réels ou aux améliorations structurelles.

Les mesures de ce gouvernement vont continuer à pousser à bout le personnel de santé, alors que le secteur figure déjà parmi ceux qui comptent le plus grand nombre de malades de longue durée. Les personnes en arrêt maladie seront de plus en plus pénalisées et devront reprendre le travail plus tôt. C'est donc un cercle vicieux qui s'installe.

L'industrie pharmaceutique épargnée

Aujourd'hui, notre politique en matière de médicaments est entièrement entre les mains de quelques géants pharmaceutiques. Ils fixent le prix des médicaments à un niveau beaucoup plus élevé que ce que coûte réellement le développement et la production. L'Arizona reste les bras croisés : alors que le gouvernement semble vouloir imposer l’austérité au secteur des soins de santé, il épargne les profits des grandes sociétés pharmaceutiques. Il ne prévoit aucune mesure concrète pour imposer des prix équitables, maintient le système des contrats secrets, et ne prend aucune mesure concrète pour lutter contre les pénuries de médicaments.

Faire plus avec moins de moyens, ce n'est pas une solution. C'est une recette dévastatrice pour la qualité de nos soins de santé

L'accord se résume à de vagues intentions, alors que des mesures très concrètes sont sur la table. Solidaris a développé le modèle du « fair price », une proposition qui permet de donner moins d’argent aux multinationales pharmaceutiques. L'Arizona ferme également la porte aux licences obligatoires. Quand on voit la générosité de l'accord de coalition envers Big Pharma, on comprend clairement où sont les priorités.

On peut résister

Alors que la crise du secteur s'aggrave, l'Arizona choisit l’austérité et la flexibilisation du travail, ce qui ne fera qu'aggraver les problèmes. Toutefois, un accord de coalition n'est pas une loi, ce sont des intentions - et nous pouvons les arrêter, ensemble.

Le 7 novembre dernier, 32 000 personnes sont descendues dans la rue pour défendre les soins de santé. Le 13 décembre, 5 000 manifestants étaient présents, tous secteurs confondus. Et le 13 janvier, ce sont 34 000 personnes qui se sont mobilisées. Le 13 février, nous pouvons empêcher, ensemble, ces mesures antisociales.

Le secteur des soins de santé doit se faire entendre dans ce mouvement. La situation est intenable et nécessite des investissements ambitieux en plus de la norme de croissance, à la fois pour alléger la charge de travail et pour garantir la santé des patients. Les mesures proposées, telles que l'allongement du temps de travail et l'accroissement de la flexibilité, ne feront qu'aggraver la crise. Faire plus avec moins de moyens, ce n'est pas une solution. C'est une recette dévastatrice pour la qualité de nos soins de santé.