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Comment De Wever et Bouchez préparent le gouvernement le plus pro-israélien que notre pays ait jamais connu

Le MR et la N-VA préparent le gouvernement le plus pro-israélien que notre pays ait jamais connu. Cela pourrait avoir des conséquences réelles sur le génocide en cours à Gaza, sur l'escalade des guerres israéliennes et étasuniennes dans la région et sur la répression à l'intérieur de notre pays. Cette situation crée de nouveaux défis pour le mouvement de solidarité avec la Palestine en Belgique et pour la société civile au sens large.

Vendredi 22 novembre 2024

Twee handen houden een bord omhoog met de boodschap ‘Free Palestine’

Avec un peu de bonne volonté, l'attitude de la Vivaldi pendant le génocide pourrait encore être qualifiée d’« omission coupable ». Au sein du gouvernement sortant composé des libéraux, des sociaux-démocrates, des Verts et du CD&V, il y a parfois eu des divergences d'opinion sur l'attitude à adopter face à la guerre barbare d'Israël à Gaza. Le Premier ministre De Croo s'est rendu à Rafah, le point de passage entre Gaza et l'Égypte, et a condamné les dégâts causés par l'armée israélienne à cet endroit, tout en rejetant une partie de la responsabilité de la guerre sur les Palestiniens.

Dans ses paroles, donc, la Vivaldi a tenu un double discours. Dans ses actes, le gouvernement De Croo a apporté un soutien passif aux crimes de guerre d'Israël. Aucune sanction diplomatique ou économique n'a été prise à l'encontre d'Israël, pas même un embargo militaire. La Belgique a également laissé passer l'occasion de reconnaître enfin la Palestine en tant qu'État, alors que l'Espagne, l'Irlande et la Norvège l'ont fait.

Cela dit, ce à quoi nous devons nous attendre de la part d’un gouvernement dirigé par Bart De Wever (N-VA) et George-Louis Bouchez (MR) est plutôt un soutien actif au génocide. La Mission palestinienne, que l’on peut comparer à une ambassade, accuse le MR de bloquer la reconnaissance par la Belgique de l'État palestinien. Au sein du MR, le président du parti, Georges-Louis Bouchez, maintient une ligne pro-israélienne dure. Après le 7 octobre 2023, il a demandé qu'un drapeau israélien soit accroché à chaque bâtiment gouvernemental. Dans une coalition comme celle de l'Arizona, que De Wever et Bouchez tentent de mettre sur pied avec le CD&V, Les Engagés et Vooruit, le MR trouverait un allié dans le plus grand parti de la coalition en question’’’, la N-VA.

Au cours des 20 dernières années, la N-VA est délibérément passée d'une position pro-palestinienne à une position résolument pro-israélienne. Depuis 2018, le parti fait sans complexe le jeu d'Israël. Le chef de file de la N-VA Theo Francken a trouvé le gouvernement d'Alexander De Croo beaucoup trop critique à l'égard d'Israël au cours du génocide : « Israël est depuis longtemps agacé par l'approche anti-israélienne unilatérale du gouvernement de gauche Vivaldi de M. De Croo. La Belgique vote systématiquement contre Israël aux Nations Unies, et la rhétorique anti-israélienne des partis au pouvoir, PS et Ecolo, à la Chambre des représentants, frise la haine. »

Au début de la guerre à Gaza, Bart De Wever a qualifié Israël de « camp de la lumière ». Son parti s'est opposé à la reconnaissance de l'État palestinien et aux sanctions économiques à l'encontre d'Israël. Dès qu'Israël a formulé des allégations à l'encontre d'employés de l'agence d'aide des Nations unies UNRWA, la N-VA s'est empressée d'exiger la suspension de tout soutien financier à cette agence.

Le chef du groupe N-VA au parlement fédéral, Peter De Roover, a également estimé qu'il était inacceptable que les partis au pouvoir osent ouvrir la porte à la possibilité d’une enquête internationale sur le risque de génocide par Israël dans la bande de Gaza. « Il y a certainement des critiques à formuler à l'égard de la politique d'Israël, mais dans toute solution, il faut obtenir l'adhésion du pays. Pensez-vous que cela changera quoi que ce soit de clouer Israël au pilori ? » Voilà le raisonnement tordu de De Roover.

Un crime de guerre ou un « coup de génie » ?

La position de ces partis se résume à dire qu’il faut faire confiance à Israël. « Israël semble avoir de bonnes cartes en main lorsqu'il s'agit de faire preuve d’une application juste des rules of engagement [les règles d'utilisation de la force] dans cette guerre », a déclaré Theo Francken à un moment où les experts en droits de l'Homme des Nations unies avaient déjà lancé à deux reprises une mise en garde contre l'imminence d'un génocide.

Pour Francken aussi, un peu de sang versé fait partie du jeu. Pour lui, il est donc absurde qu’Alexander De Croo demande que l'on mette fin aux massacres de civils. En effet, selon Francken, cela signifierait « qu'Israël devrait arrêter son offensive militaire puisque dans cette guérilla urbaine, même si toutes les règles sont respectées, le risque de pertes civiles reste élevé ».

Un exemple flagrant du mépris de la N-VA et du MR pour le droit international est leur réaction à l'attaque israélienne par bipeur au Liban en septembre 2024. Au cours de cette opération, plus de 3000 civils innocents ont été blessés et douze d'entre eux, dont deux enfants, ont succombé à leurs blessures. Alors que les experts estiment qu'il s'agit probablement d'un crime de guerre, Theo Francken et Georges-Louis Bouchez ont tous deux qualifié cet acte de terreur de « génie ».

En réponse à des activistes qui l'avaient interpellé à ce sujet à l'université de Gand, George-Louis Bouchez a répondu qu'Israël avait tout simplement le droit d'infliger des pertes civiles lorsqu'il envahissait des pays voisins : « Connaissez-vous une seule guerre dans l’histoire où il n’y a pas eu de victime civile ? [...] Le 11 septembre 2001, il y a eu 2500 morts. [...] On a mené deux guerres, une guerre en Irak et une guerre en Afghanistan dont la Belgique était partie. Il y a eu sur ces deux conflits au moins un demi-million de morts. Est-ce que aujourd’hui, il y en un dans cette salle qui pense que la Belgique est un État génocidaire ? »

Vers une solution à zéro État

Officiellement, il existe un consensus sur la solution dite à deux États. « Ainsi, deux États indépendants seraient établis sur le territoire de la Palestine », a précisé le député flamand de la N-VA Karl Vanlouwe.

L'interprétation de la N-VA de cette « solution à deux États » est toutefois originale. En réalité, elle ressemble étrangement à la poursuite de la situation actuelle. Selon Michael Freilich, député N-VA, l'idée d'une solution à deux États est « que les résidents arabes soient les bienvenus en Israël (comme c'est le cas aujourd'hui), et vice versa ». Il ignore là le fait que les Palestiniens n'ont pas du tout le droit de s'installer en Israël, car ce droit est réservé aux Juifs. En outre, les résidents palestiniens qui vivent déjà en Israël sont des citoyens de seconde zone.

Theo Francken n'hésite pas à proposer la déportation de tous les habitants de Gaza : « Gaza est le nœud le plus difficile. Elle est totalement isolée, sans lien direct avec les territoires palestiniens. Vous pouvez placer cette zone sous mandat de l'ONU et la reconstruire, mais Israël n'acceptera plus que le Hamas y prospère. En fait, il faut emmener les habitants de Gaza dans d'autres zones palestiniennes ». Il s'agit ni plus ni moins d'un appel au nettoyage ethnique.

Soutien à la guerre totale

Dans un gouvernement incluant la N-VA et le MR, Theo Francken est pressenti par ses amis et ses ennemis comme candidat au poste de ministre de la Défense. Quoi qu'il en soit, il a clairement l'ambition de peser sur la politique de défense et la politique étrangère. En tant que vice-président du parlement de l'Otan et fan autoproclamé du parti républicain de Donald Trump, Francken est l'un des plus fidèles alliés de l'impérialisme nord-américain dans la politique belge.

Selon Francken, le génocide à Gaza va simplement dans le sens des intérêts des États-Unis et de l'Europe : « Je suis moi-même père : quand je vois un petit gars pleurer parce que toute sa famille a été tuée, cela me touche. Mais je vois aussi le contexte : l'Occident est en guerre contre la Russie, la Chine et l'Iran. Israël est notre allié dans cette lutte ». Ou encore : « Quand on regarde la situation dans son ensemble, il est difficile de ne pas soutenir Israël dans ses efforts géopolitiques. C'est la meilleure garantie d'un Occident sûr. »

Il y a quelques années, il écrivait sur un blog : « Personnellement, je suis pour une répression du régime iranien. Je suis d'accord avec l'ancien président Trump et le Premier ministre Netanyahou sur ce point. (...) Un changement de régime à Téhéran doit rester notre ambition, non pas par la guerre, mais par un embargo strict sur le commerce, les biens et les investissements, et en alimentant la contestation interne ».

Il a écrit cela avant les guerres de Gaza et du Liban. La guerre comme moyen de parvenir à un changement de régime à Téhéran n'est plus un tabou aujourd'hui. « Après un an, la première guerre entre Israël et l'Iran s'est étendue de Gaza au Yémen en passant par l'Irak, le Liban et la Syrie. Israël ne peut pas perdre » selon Francken. Un mois après l'attentat au Liban, il appelle à l'intensification de la guerre contre l'Iran car il est « temps de passer à autre chose ».

Si Theo Francken arrive à la tête de la défense belge sous l’Arizona, la Belgique deviendra le premier supporter d'Israël alors qu’il enflamme la région.

Criminalisation de la solidarité avec la Palestine

Les effets du tandem De Wever - Bouchez ne se feront pas sentir qu’au Moyen-Orient. La N-VA et le MR ont déjà laissé entendre vouloir réprimer le mouvement de solidarité avec la Palestine.

La criminalisation de la résistance commence par le fait de rendre suspectes les opinions indésirables. Georges-Louis Bouchez a demandé un cordon sanitaire autour du PTB en 2023 parce que son président, Raoul Hedebouw, a déclaré que le gouvernement israélien était au moins aussi terroriste que le Hamas. Selon le MR, « l'antisionisme (contre la politique de l'État d'Israël, ndlr) traduit une forme d'antisémitisme (haine des Juifs, ndlr) ». Le député MR Denis Ducarme est allé plus loin et a proposé, à l'instar de la France, d'interdire « l'apologie du terrorisme ». Il fait explicitement référence aux opinions pro-palestiniennes de Raoul Hedebouw, qu'il voudrait donc criminaliser.

C'est une recette éprouvée à l'étranger que d'utiliser l'accusation d'antisémitisme (haine envers les Juifs) comme prétexte à une répression sévère contre quiconque s'élève contre le génocide à Gaza. En assimilant Israël aux Juifs, toute critique à l'égard d'Israël peut être interprétée comme propos haineux envers les Juifs.

L'ancien président du parti travailliste britannique, Jeremy Corbyn, a été traîné dans la boue par la presse à scandale pour avoir toujours milité en faveur de la Palestine. Sur la base d'accusations d'antisémitisme infondées, Corbyn a finalement été exclu du parti par des opposants de droite.

En France, des rivaux politiques ont accusé Jean-Luc Mélenchon, président du parti de gauche La France Insoumise, d'antisémitisme à quelques semaines des élections législatives parce qu'il critique vivement la politique du gouvernement israélien.

Mais cela ne s'arrête pas aux allégations. Arguant que toute position pro-palestinienne trahit un motif antisémite, certains gouvernements prennent des mesures pour interdire la solidarité avec la Palestine. L'Allemagne et la France ont interdit toute manifestation pro-palestinienne dans les semaines qui ont suivi le 7 octobre. Aux Pays-Bas, les manifestations pacifiques d'étudiants ont fait l'objet d'une incroyable répression et les orateurs palestiniens se sont vu refuser l'entrée sur le territoire.

Bouchez se pose en grand admirateur de cette approche. Selon ses dires, il y aurait sur la table des négociations des propositions pour permettre au gouvernement fédéral d’intervenir contre le droit de manifester des militants pro-palestiniens. « Si les bourgmestres ne prennent pas leurs responsabilités, il y aura la possibilité de se substituer à eux pour interdire certains rassemblements. Il n'est plus question à Bruxelles d'avoir des manifestations avec des mecs en keffieh qui cachent l'intégralité de leur visage et qui chantent "from the river to the sea". »

En outre, il a déjà annoncé que « dans l'accord de coalition, le ministre de l'intérieur interdira certaines associations qui sont déjà interdites dans d'autres pays européens, comme Samidoun ».

Aux États-Unis et au Canada, Samidoun figure sur la liste des organisations terroristes. En Allemagne et en France, l'organisation a déjà été interdite ; aux Pays-Bas, le gouvernement prend également des mesures en ce sens. Theo Francken et Denis Ducarme, entre autres, appellent la Belgique à suivre leur exemple. Mais leur intention est clairement d'utiliser Samidoun comme un tremplin pour une chasse aux sorcières plus large. Normalement, les organisations ne sont interdites en vertu des lois antiterroristes que si elles menacent de recourir ou d'inciter à la violence. Dans le cas de Samidoun, l’organisation est interdite sur la base de ses opinions. Il s'agit d'un précédent extrêmement dangereux.

La Flandre a déjà tenté de retirer leur financement aux associations sur base de leur position. « Lorsqu'une organisation subventionnée par la Flandre soutient un mouvement qualifié d'antisémite dans d'autres pays, il faut se poser des questions », avait déclaré à l'époque le député flamand N-VA, Marius Meremans. « Nous constatons par exemple que l’asbl Vrede, subventionnée par le gouvernement flamand, prend activement parti dans ce conflit. Elle soutient le mouvement BDS, que certains associent au Hamas. »

Le premier ministre flamand, Jan Jambon, avait rapidement ordonné le contrôle de toutes les organisations subventionnées dans le cadre du décret sur le travail socioculturel des adultes. Il avait également annoncé une inspection chez le média alternatif DeWereldMorgen et l’asbl Vrede.

Bref, avec De Wever et Bouchez à la barre, le mouvement de solidarité avec la Palestine, comme tout mouvement de protestation, va devoir faire face à une répression féroce. Cependant, les exemples de nos pays voisins, où cette répression est déjà une réalité aujourd'hui, montrent que la détermination du mouvement de solidarité est forte. Même en Grande-Bretagne, en Allemagne, aux Pays-Bas et en France, l'opposition au génocide israélien et à la complicité européenne n'a pas faibli.