Avec la « Global Strike » de ce 20 septembre, le mouvement climatique se relance
Après des mois d’actions pour le climat, les partis traditionnels restent sourds à l’appel des climatologues et des centaines de milliers de gens qui se sont mobilisés. En Flandre, Bart De Wever ne veut pas entendre parler d’ambitions climatiques. À Bruxelles et en Wallonie, on reste enfermé dans les illusions du capitalisme vert et des « petits pas ».
Cette année a été l’année de tous les records pour le mouvement climatique. Le 2 décembre dernier, 65 000 personnes manifestaient pour le climat à Bruxelles, à la veille du sommet climatique en Pologne. Un record… battu une nouvelle fois à peine un mois plus tard, avec 70 000 personnes dans la rue.
Mais c’est surtout le mouvement de grèves écolières de ces derniers mois qui était exceptionnel, avec une grève tous les jeudis pendant 20 semaines. Au pic du mouvement, 35 000 écoliers étaient en grève pour aller manifester à Bruxelles. Le mouvement écolier a provoqué un débat dans l’ensemble de la société et conduit à ce que les organisations syndicales appellent à la grève mondiale (Global Strike) le 15 mars. La première grève syndicale pour le climat était née. L’événement était également exceptionnel de par son ampleur mondiale. 1,4 million de personnes ont été mobilisées dans le monde entier.
Le climat a donc été mis en haut de l’agenda politique alors que le gouvernement l’avait ignoré pendant quatre ans. Le mouvement climatique est devenu un mouvement de masse. Et maintenant ?
L’illusion du capitalisme vert
La Fédération des Entreprises de Belgique (FEB) ainsi que le représentant des grandes entreprises flamandes VOKA ont depuis longtemps compris le danger que représente le mouvement climatique pour leurs profits. Les deux organisations patronales s’étaient farouchement opposées à l’adoption de la Loi Climat en mars dernier. (Lire plus à propos de la Loi Climat) La FEB rappelait encore récemment qu’elle s’oppose à toute augmentation des ambitions climatiques (L’Echo, 19 juin). Le président de la N-VA, Bart De Wever, a bien compris le message. Dans sa « Note de départ » pour former le gouvernement flamand, il affirme explicitement ne pas vouloir augmenter les ambitions climatiques. Pendant ce temps-là, la jeunesse du Vlaams Belang avec qui Bart De Wever a négocié pendant des semaines intimidait physiquement Anuna De Wever et d’autres jeunes activistes climatiques à Pukkelpop.
Malheureusement, les partis qui reconnaissent la gravité du changement climatique se limitent jusqu’ici à des déclarations d’intention et restent enfermés dans le même carcan depuis le premier sommet climatique en 1992 : celui du marché. Alors qu’en Belgique, 300 multinationales sont responsables de 40 % des émissions de gaz à effet de serre, les partis traditionnels refusent toujours de leur imposer des normes contraignantes. Barbara Trachte (Ecolo), ministre bruxelloise en charge de la Transition économique, ne « va pas dire aux chefs d’entreprise ce qu’ils doivent faire dès demain », mais souhaite que « les entreprises réfléchissent à leur impact écologique » (Le Soir, 29 août).
En Wallonie, la nouvelle ministre de l’Environnement (Ecolo) n’est autre que Céline Tellier, l’ex-porte-parole de Sign for My Future, la plus grande campagne jamais utilisée par des multinationales pour du « Greenwahing », soit pour verdir leur image. Parmi celles-ci, des multinationales polluantes telles que BNP PariBas Fortis, la KBC, Unilever ou encore Danone. (Lire plus sur la campagne Sign for my Future)
En matière d’investissements nécessaires pour réaliser la transition écologique, il n’existe aucun plan pour les réaliser. Ni en Wallonie, ni à Bruxelles. Alain Maron (Ecolo), le ministre bruxellois de la Transition climatique, de l’Environnement et de l’Energie, affirme vouloir atteindre la neutralité climatique d’ici 2050 mais admet qu’il n’existe encore ni modalités, ni calendrier et encore moins de budget pour la mise en œuvre de ces ambitions. (Le Soir, 4 septembre)
Vers la saison 2 du mouvement climatique
Le changement ne viendra pas d’un prétendu « gouvernement climat » dans le cadre du système actuel. Seule la mobilisation peut débloquer la situation dans laquelle les partis traditionnels tentent de nous enfermer. C’est ce qu’a compris Greta Thunberg depuis longtemps. En novembre dernier déjà, lors du dernier sommet climatique, elle affirmait : « Tant que vous ne vous concentrez pas sur ce qui doit être fait au lieu de ce qui est politiquement possible, il n’y aura pas d’espoir. On ne peut pas solutionner une crise sans la traiter comme une crise. Nous devons laisser les combustibles fossiles dans le sol et nous devons nous concentrer sur l’équité. Et si des solutions à l’intérieur du système sont si difficiles à trouver, nous devrions peut-être changer le système lui-même. […] Nous sommes venus ici pour vous faire savoir que le changement arrive, que vous le vouliez ou non. Le vrai pouvoir appartient au peuple. »
Le mouvement climatique a plusieurs atouts :
- une génération d’écoliers ont appris à lutter ces derniers mois,
- énormément de femmes sont devenues des leadeuses,
- le mouvement est parti de Flandre et est rapidement devenu national, avec des jeunes qui chantent « On est plus chaud que le climat » d’Ostende à Arlon,
- le mouvement s’organise à l’échelle internationale
- et la mobilisation de la jeunesse a convaincu les étudiants de les rejoindre et les organisations syndicales d’appeler à la première grève syndicale pour le climat de l’histoire en Belgique.
Écoliers, étudiants, travailleurs : ensemble pour le climat
Plusieurs milliers de travailleurs et travailleuses avaient répondu présent à l’appel des syndicats de participer à la Global Strike le 15 mars dernier. Les organisations syndicales sont les principales organisations des travailleurs et travailleuses de ce pays. Le mouvement climatique a besoin d’elles pour être assez puissant et imposer les changements nécessaires au niveau climatique. Elles sont nécessaires pour traduire les aspirations à la fois climatiques et sociales de la population.
Cependant, si le mouvement climatique veut gagner le cœur de la population, il devra se distancier de l’écologie punitive promue par les partis traditionnels. Les taxes « vertes » comme la taxe carbone ou la taxe kilométrique sont anti-sociales, inefficaces et contre-productives. Elles sont injustes socialement, car tout le monde paie la même chose, quel que soit son revenu : celui qui peut payer, peut polluer. Elles sont inefficaces, car beaucoup de gens n’ont pas d’autre choix que de prendre leur voiture, faute de transports en commun de qualité et en quantité suffisante. Elles sont enfin contre-productives, car elles poussent une partie de la population dans les bras des climato-sceptiques.
Une enquête réalisée en 2017 par le SPF Environnement montre d’ailleurs que 92 % des personnes interrogées estiment que c’est surtout l’industrie qui doit faire des efforts, et 70 % d’entre eux estime qu’elle doit fournir « le plus d’efforts ». Les taxes « vertes », elles, sont clairement impopulaires.
Le PTB sera donc présent à la Global Strike du 20 septembre, de même que RedFox et Comac, ses mouvements de jeunes et d’étudiants.