Après les applaudissements, la privatisation ? Non merci !
Depuis un mois, les actions syndicales se multiplient à l'hôpital Saint-Pierre. Des travailleurs se battent contre la privatisation du service de gardiennage. Le PTB déplore que le débat sur un sujet aussi important ne soit pas mené politiquement. Le parti de gauche soutient le personnel et le front large qui se bat contre cette privatisation.
Le 2 mai, la direction de l’hôpital Saint-Pierre annonce aux membres du service de gardiennage la privatisation de leur service. Une annonce qui choque les syndicats et le personnel, car des négociations se tenaient depuis plus d’un an entre syndicats et direction, concernant la répartition des prestations entre la semaine et les week-end. La direction souhaite plus de prestations en semaine et moins en week-end, ce qui implique une perte des primes de week-end et donc une perte financière. Un accord avait pourtant été trouvé entre syndicats et employeurs. Conclu le 5 avril 2022, il prévoyait le début d’un nouvel horaire en septembre moyennant une phase de test de 3 mois. La direction envoie aux organisations syndicales une simulation du nouveau planning sauf que…le conseil d’administration finit par annoncer la privatisation. Pire, la décision de privatiser ce service était prise bien avant l’accord.
Jan Busselen, député PTB au Parlement bruxellois, interpelle le ministre de la Santé, Alain Maron. Celui-ci se dédouane de toute responsabilité et renvoie aussi la balle au réseau hospitalier Iris. Lorsque Bruno Bauwens, conseiller communal PTB à la Ville de Bruxelles, demande à son tour des explications, la majorité PS-Ecolo lui répond que le sujet devait être abordé au sein du conseil du CPAS, prétextant que le CPAS a la tutelle sur l’hôpital, ce que le CPAS dément. Ce dernier renvoie vers le… Conseil communal alors que Monsieur Zian, Président du CPAS, siège au CA du CHU Saint-Pierre.
Les syndicats ont organisé depuis plusieurs actions pour sauver les 30 emplois publics. La CGSP, la CSC et le SLFP se sont rassemblés le 23 mai devant le Conseil communal de la Ville de Bruxelles pour interpeller le conseiller Mohamed Ouriaghli (PS), qui préside aussi le conseil d’administration du CHU. Mais la présidente du Conseil les a fait sortir. Et quand on interroge le ministre Alain Maron, celui-ci nous répond que tout le monde est compétent et que personne n’est responsable, comme souvent avec les questions qui fâchent.
La résistance contre la privatisation d'un service public grandit
Une grève de 48 heures par les agents de sécurité du CHU St-Pierre a eu lieu les 24 et 25 mai, avec le soutien des trois syndicats en front commun. La CGSP Police se joint à leurs contestations. “Nous travaillons chaque jour avec ce service, parfois même plusieurs fois par jour, s’inquiète une représentante de la CGSP Police. Ce sont des gardiens très professionnels, qui nous appellent seulement quand ils en ont besoin et quand c’est nécessaire”.
Une semaine plus tard, les syndicats organisent une action devant le siège du PS, avec des délégations syndicales de Bruxelles-Propreté et des CPAS.
Une pétition contre la décision de privatiser le service de gardiennage de cet hôpital public, comptant 634 signatures sur les quelque 2.400 membres du personnel, a été remise mardi à la direction. Mais ni le directeur de l'hôpital, ni le président du CA ne font l'effort de répondre à l'inquiétude du personnel. La méfiance et la colère grondent, le sentiment d'un manque de respect de la part de la direction est grand.
Un soutien du monde académique et culturel
Le 7 juin, une tournure inattendue s'annonce. Une carte blanche de soutien au mouvement contre la privatisation est publiée sur le site du journal Le Soir. Elle est signée par 100 universitaires, tout comme des personnalités du monde du cinéma parmi lesquelles les réalisateurs Ken Loach, Luc Dardenne et Lukas Dhont. Les signataires soutiennent l’organisation d’un référendum à l’initiative des travailleurs et travailleuses du personnel de Saint-Pierre, concernant la privatisation du service de gardiennage. Ils s’interrogent également sur le mécanisme de la privatisation comme solution pour améliorer un service public.
Une privatisation peut en cacher une autre
Le vendredi, 10 juin, lors d'une action surprise près du Manneken Pis, le bourgmestre Philippe Close (PS) assume la direction prise par Mohamed Ouriaghli. Au moins, les choses sont claires : au PS, il est possible de revendiquer l'arrêt de la privatisation des services publics le 1er mai et de privatiser un service public quelques jours plus tard.
Une telle légèreté face à ses propres principes interroge. Une privatisation peut en cacher une autre. On sait que certains politiciens rêvent de l'idée de privatiser d’autres services de la ville, comme par exemple les services de nettoyage des écoles. Dans les hôpitaux qui dépendent du non marchand, comme Erasme, St Luc ou Chirec, les services de nettoyage, la logistique ou les cuisines sont déjà privatisé(e)s. Les conséquences pour les travailleurs sont dures : plus de flexibilité, moins de garantie d’emploi, des barèmes salariaux plus faibles.
Une privatisation modifie aussi le rapport de force en faveur de l'employeur, car les services privatisés dépendent d'autres commissions paritaires et d'autres centrales syndicales. Avec cette privatisation, le risque est grand de faire entrer la logique néolibérale dans l’hôpital.
Le PTB continuera à soutenir la lutte des travailleurs qui s'opposent à cette privatisation. Nos élus continueront à interpeller les différents niveaux de pouvoir, car il est inacceptable de la part du PS et Ecolo de vouloir privatiser un service public et de vouloir étouffer le débat politique.